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DAMES JEU DE

Histoire

Mérelles de douze : damier - crédits : Encyclopædia Universalis France

Mérelles de douze : damier

C'est sans doute l'Espagnol Josep Brunet y Bellet qui a proposé le premier, à la fin du xixe siècle, l'hypothèse la plus crédible quant à l'origine des dames en tant que telles : celles-ci seraient nées au Moyen Âge de la transposition du jeu alquerque de doce (« mérelles de douze ») sur un échiquier, en y associant la promotion du pion. Par là, l'historien espagnol s'opposait à ceux qui voyaient dans les dames une simplification des échecs. Les mérelles de douze se jouaient sur un tablier fait de 5 lignes horizontales et de 5 lignes verticales entrecroisées et traversées de diagonales dans les deux sens (fig. 2). Les pions, au nombre de 12 par joueur, se déplaçaient sur les intersections, offrant ainsi 25 positions (cases) possibles. Ce jeu bien connu en Espagne est décrit en détail dans le célèbre Livre des jeux du roi Alphonse X de Castille (1283).

L'historien des échecs Harold Murray devait par la suite adopter le point de vue de Brunet y Bellet en y greffant ses propres trouvailles. Dans son livre A History of Board Games other than Chess (Oxford, 1952), il affirme que le jeu est né au xiie siècle, probablement dans le sud de la France. Un peu plus loin, il rappelle que le nom de dames a été emprunté au nom de la dame aux échecs, d'abord nommée fers ou fierge, puis dame à partir du xive siècle. Murray décrivait ainsi la naissance des dames : « Sans conteste l'un des ancêtres étaient les échecs, qui ont fourni le tablier et le nom des dames, fers aussi longtemps qu'il fut utilisé aux échecs, puis son successeur en français dame et, après la disparition de la forme médiévale des échecs, les termes peón en espagnol, pion en français et pedina en italien. L'autre ancêtre paraît bien être l'alquerque, qui a fourni le nombre de pions et le mode de capture. » Ce « jeu de fierges », suggéré par Murray et que documentent cinq références seulement avant 1500, est néanmoins fort discuté. Dès le milieu du xive siècle, ce jeu aurait donc pris à son tour, sans doute en France, le nom de « jeu de dames ». En Angleterre, le jeu fut nommé draughts (littéralement « traits »), dès le milieu du xve siècle, et en Catalogne, marro (de punta). Reprise et développée par l'historien néerlandais Kruijswijk, l'évolution qui conduit des mérelles de douze, transposées sur un échiquier, au jeu de dames moderne est aujourd'hui la plus plausible.

Ce jeu primitif, qui ne connaissait pas l'obligation de prendre, aurait survécu dans la France rurale jusqu'au xviie siècle sous le nom de « jeu plaisant ». Le jeu nouveau, proprement appelé « dames », apparaît au début du xvie siècle, ne différant du précédent qu'en ce que la prise y est obligatoire. Cette nouvelle règle fondamentale fut, selon Murray, introduite en France, peut-être en relation avec l'évolution qu'avait connue le jeu d'échecs peu auparavant. Mais l'hypothèse d'un berceau espagnol n'est pas à exclure. Ce nouveau jeu de dames, parfois appelé en français « jeu forcé » ou « forçat », se répandit rapidement en Europe au cours du xvie siècle.

On considère que la première occurrence du jeu « forcé » est celle que fournit Rabelais dans sa liste des jeux du Gargantua (chap. xxii), en 1534. Partout en Europe s'impose alors le vocable « dames » ; en castillan, damas se substitue à marro. Le vocabulaire se précise : ainsi, l'appellation « dame » est désormais réservée au pion promu (dit aussi « pion damé », « dame damée ») ; les « dames » (ci-avant fierges) ordinaires prenant le nom de « pions », terme emprunté aux échecs.

Un début de littérature technique s'esquisse, d'abord en Espagne avec El ingenio, o juego de marro de punta o damas, d'Antonio de Torquemada (Valence, 1547 – aucun[...]

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Écrit par

  • : licencié ès lettres, ingénieur du Conservatoire national des arts et métiers, historien du jeu

Classification

Médias

Damier à 100 cases - crédits : Encyclopædia Universalis France

Damier à 100 cases

Mérelles de douze : damier - crédits : Encyclopædia Universalis France

Mérelles de douze : damier

Autres références

  • BACKGAMMON

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    • 856 mots
    • 3 médias

    Le backgammon est un jeu d'origine anglaise qui oppose deux joueurs de part et d'autre d'un tablier comportant vingt-quatre flèches ou cases. Chaque joueur, muni de quinze pions blancs ou noirs selon son camp, s'efforce de conduire ceux-ci de leur point de départ à l'opposé du tablier en respectant...