GO JEU DE
Tactique et stratégie
Si aux échecs la stratégie est sous la dépendance étroite de la tactique, au go c'est l'inverse qui est vrai. Néanmoins, les considérations stratégiques étant incompréhensibles sans quelques aperçus tactiques, nous exposerons d'abord ceux-ci.
On a vu que le but du jeu était d'acquérir le plus grand nombre possible de territoires ; mais ceux-ci n'ont pas été définis avec précision. Un rôle tout à fait central est dévolu dans l'économie du jeu au « théorème des deux yeux » : c'est une conséquence des règles de capture, qui décrit le type des groupes de pions imprenables, les intersections vides qu'ils contiennent nécessairement constituant alors les « véritables » territoires. En mettant à part quelques configurations exceptionnelles, les groupes de pions imprenables sont du type suivant : des groupes de pions connexes séparant deux groupes d'intersections vides (la taille de ces derniers n'est pas tout à fait quelconque, mais il est impossible de formuler une règle générale). Le diagramme 4 a montre un territoire de deux points pour les noirs : ceux-ci, bien qu'entourés par les blancs, sont saufs ; en effet, pour les tuer, les blancs devraient occuper Δ et X, ce qui leur est interdit par la deuxième règle de capture.
On ne saurait sous-estimer le rôle de ce « théorème » : dans la situation du diagramme 4 b, les noirs, jouant en X, s'assurent deux petits points de territoire ; si au contraire les blancs jouent en X avant eux, les noirs sont tous morts (cf. infra), ce qui fait la considérable différence de vingt-huit points entre les deux situations.
Les débutants ont tendance à voir deux yeux là où l'un au moins est « faux » ; le diagramme 4 c montre quelques exemples de configurations où l'on trouve un faux œil, les groupes de pions correspondants n'étant pas imprenables, si même ils ne sont pas « morts » (un groupe de pions est dit mort lorsqu'on peut montrer qu'il n'a aucun moyen de former deux yeux ; dès lors, il n'est pas nécessaire de jouer dans la région et, comme déjà dit, lesdits pions seront retirés du goban et joints aux prisonniers effectifs à la fin de la partie).
Les problèmes de vie ou de mort des pions (tsumego) constituent un excellent entraînement à l'appréciation des situations tactiques.
Donnons quelques exemples de tactiques tout à fait élémentaires :
– Le shi-chō. Dans la situation des diagrammes 5 a et 5 b, le pion blanc ne doit pas être défendu lorsque les noirs ont joué en 1. On prolongera la suite de coups initiée en 1 pour se convaincre que la défense des blancs est futile. La présence d'un deuxième pion blanc comme en N2 du diagramme 5 c permet au contraire aux blancs de retourner la situation à leur avantage (diagr. 5 d).
– Le coiffage (ou geta, « sabot »). Si, comme dans le diagramme 6, les blancs jouent en 1, on se convaincra qu'ils ne peuvent pas échapper à la capture. Un exemple plus compliqué de coiffage est donné dans les diagrammes 7 a, b, c, d, e et f : après l'échange 1, 2, 3, les blancs menacent deux groupes avec 4 ! Si, comme dans le diagramme 7 d, les noirs sauvent leur pion isolé avec 7, les blancs échappent avec 8. Par suite, les noirs doivent sacrifier le pion, coiffer avec 7 et le coup 8 ne sauve pas les blancs comme on peut le voir sur les diagrammes 7 e et f.
– Jeux de sacrifice. Dans le diagramme 8, après le sacrifice des blancs en 1, les noirs subissent une recapture immédiate en 3. Dans le diagramme 9, les blancs, jouant le pion 1 sacrifié, capturent tous les noirs malgré leur futile défense 2, 4, 6. Dans le diagramme 10, si c'est aux blancs de jouer, que peuvent-ils faire pour sauver leurs pions apparemment perdus ? En jouant en 1 (diagr. 10 a), les blancs mettent deux pions noirs en échec, ceux-ci connectent[...]
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Écrit par
- Jacques ROUBAUD : écrivain
Classification
Médias
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