JEUX OLYMPIQUES La renaissance des Jeux
La conférence de la Sorbonne en 1892
En novembre 1892, l'U.S.F.S.A. fête donc son cinquième anniversaire. Pierre de Coubertin, secrétaire général de l'U.S.F.S.A., souhaite marquer dignement l'événement et profiter de l'occasion pour proposer la renaissance des jeux Olympiques. Du 20 au 27 novembre, un « festival des sports », parrainé par le président de la République Sadi Carnot, est organisé dans Paris (courses cyclistes, cross-country interscolaire à Bellevue, réunion interclubs au bois de Boulogne, courses à pied, escrime, etc.). Mais, pour Coubertin, le point culminant de cette semaine d'épreuves sportives et de mondanités (excursion à Ville-d'Avray, inauguration du club house du Stade français, banquets...) est la conférence qu'il a convoquée pour le 25 novembre 1892 dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, sur le thème des « exercices physiques dans le monde moderne ».
La conférence est placée sous le patronage du grand duc Vladimir de Russie. De multiples personnalités se trouvent dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne : au côté de Coubertin, on reconnaît notamment sur l'estrade James Gordon Bennet, éditeur de l'International Herald Tribune, le vicomte Léon de Janzé, président de l'U.S.F.S.A., Octave Gréard, recteur de la Sorbonne... Le prince Obolensky, maréchal russe, ouvre la soirée ; on joue La Marseillaise et l'hymne russe ; l'assistance écoute une ode composée par Ernest Callot, membre éminent de l'U.S.F.S.A. ; Georges Bourdon prononce un discours sur les sports pratiqués dans l'Antiquité, fait l'éloge des athlètes grecs et de Pindare. L'historien Jean Jules Jusserand évoque la vie sportive au Moyen Âge. Coubertin clôt la conférence par un long discours, dans lequel il adresse des louanges à Georges de Saint-Clair, fondateur de l'U.S.F.S.A., prône l'éducation physique, qui inculque la discipline, l'hygiène, forme le caractère et libère l'individu, vante la culture contemporaine imprégnée d'hellénisme... Coubertin conclut son intervention par une exhortation appelée à devenir célèbre : « Il y a des gens que vous traitez d'utopistes lorsqu'ils vous parlent de la disparition de la guerre, et vous n'avez pas tout à fait tort ; mais il y en a d'autres qui croient à la diminution progressive des chances de guerre, et je ne vois pas là d'utopie. Il est évident que le télégraphe, les chemins de fer, le téléphone, la recherche passionnée de la science, les congrès, les expositions ont plus fait pour la paix que tous les traités et toutes les conventions diplomatiques. J'ai l'espoir que l'athlétisme fera plus encore. Ceux qui ont vu trente mille personnes courir sous la pluie pour assister à un match de football ne trouveront pas que j'exagère. Exportons des rameurs, des coureurs, des escrimeurs : voilà le libre-échange de l'avenir, et le jour où il sera introduit dans les mœurs de la vieille Europe, la cause de la paix aura reçu un nouvel et puissant appui. Cela suffit pour encourager votre serviteur à songer maintenant à la seconde partie de son programme ; il espère que vous l'y aiderez comme vous l'avez aidé jusqu'ici, et qu'avec vous il pourra poursuivre et réaliser sur une base conforme aux conditions de la vie moderne cette œuvre grandiose et bienfaisante : le rétablissement des jeux Olympiques. »
Pour la première fois, Pierre de Coubertin avance publiquement son grand projet : faire renaître les jeux Olympiques. Il s'attend que tous ces intellectuels, touchés par son éloquence et bouleversés par cette idée immense et généreuse, crient leur enthousiasme. Or l'auditoire ne manifeste que doute et incompréhension. Quelques questions fusent : « Quels jeux Olympiques, une copie des Jeux grecs ? » ; « Et où cela, en Grèce ? » ; « Est-ce que[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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