JEUX OLYMPIQUES Les Jeux et la guerre froide
Une « guerre » sans vainqueur ?
Qui a remporté la « course à l'espace » ? L'U.R.S.S., qui en 1957 a mis en orbite Spoutnik, le premier satellite artificiel de la Terre, puis, en 1961, a envoyé pour la première fois un homme dans l'espace, Iouri Alexeïevitch Gagarine ? Les États-Unis, qui, en 1969, ont permis à un homme, Neil Armstrong, de marcher sur la Lune ? La réponse est difficile. Elle s'avère tout aussi complexe en ce qui concerne la « guerre froide olympique ». En excluant les Jeux de Moscou boycottés par les Américains et les Jeux de Los Angeles boycottés par les Soviétiques, le bilan, pour les Jeux d'été (1952-1988), fait ressortir une courte victoire soviétique : l'U.R.S.S. a obtenu trois cent quinze médailles d'or et huit cent quinze médailles au total ; les États-Unis se sont adjugé trois cent quatorze médailles d'or et sept cent six médailles au total. Sur la même période, l'U.R.S.S. a occupé la première place du bilan cinq fois (1956, 1960, 1972, 1976, 1988), les États-Unis trois fois (1952, 1964, 1968).
Concernant les Jeux d'hiver, toute comparaison n'a guère de sens, car l'U.R.S.S. leur accorde une grande importance, alors que les États-Unis délaissent de nombreuses disciplines hivernales. Ainsi, de 1952 à 1988, l'U.R.S.S. a obtenu soixante-dix-huit médailles d'or et cent quatre-vingt-quatorze médailles au total, alors que, sur la même période, les États-Unis ne récoltaient que vingt-neuf médailles d'or et quatre-vingt-cinq médailles au total.
Mais y eut-il réellement une « guerre » ? Il convient d'abord de souligner que, si les dirigeants politiques, à l'Est comme à l'Ouest, ont mis en exergue les succès de « leurs » champions, la rivalité sportive fut le plus souvent marquée du sceau du fair-play. Les incidents et les mauvais comportements furent très rares, à l'image de ce match de hockey sur glace de 1980 : malgré l'enjeu, la partie ne dégénéra jamais, elle se déroula sans brutalités excessives, les Soviétiques félicitèrent semble-t-il de bonne grâce leurs vainqueurs. On peut éventuellement souligner les incidents qui émaillèrent la finale du tournoi de basket-ball aux Jeux de Munich, en 1972, qui vit la victoire de l'U.R.S.S. sur les États-Unis (51-50), les Américains refusant de se présenter sur le podium pour recevoir leur médaille d'argent : mais ces incidents sont liés plus à une décision arbitrale discutable qu'à une hostilité entre joueurs.
En outre, pour évoquer une « guerre », il faut qu'il y ait un « champ de bataille ». Or rares sont les sports pour lesquels Américains et Soviétiques se posèrent réellement en rivaux, chaque pays ayant ses disciplines de prédilection : gymnastique, lutte, haltérophilie, escrime, volley-ball pour l'U.R.S.S. ; athlétisme, natation, basket-ball pour les États-Unis. En outre, l'U.R.S.S. mit particulièrement l'accent sur le sport féminin, relativement délaissé par les États-Unis.
Ainsi, toujours en excluant les Jeux de Moscou et de Los Angeles, les États-Unis ont remporté quatre-vingt-dix-sept médailles d'or et deux cent huit médailles au total en athlétisme, alors que l'U.R.S.S. affiche un bilan de quarante-neuf médailles d'or et cent cinquante-deux médailles au total ; en natation, les États-Unis ont obtenu quatre-vingt-sept médailles d'or et deux cent onze médailles au total, quand l'U.R.S.S. se contentait de quatre médailles d'or et trente-sept médailles au total. A contrario, en gymnastique, les Soviétiques récoltèrent soixante-trois médailles d'or et cent soixante médailles au total, alors que les Américains ne glanèrent que deux médailles de bronze ; en lutte, l'U.R.S.S. affiche cinquante médailles d'or et quatre-vingt-dix-neuf médailles au total, les États-Unis dix médailles d'or et trente médailles au total ; en haltérophilie,[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
Classification