HOFFA JIMMY (1913-1975 env.)
James Riddle Hoffa est né dans une bourgade de l'Indiana en 1913. Son père, de souche germanique (la consonance italienne est trompeuse), était mineur. Il meurt de la silicose en 1920.
Quatre ans plus tard, sa veuve se fixe à Detroit avec ses quatre enfants (James est le second). La famille est dans la gêne. Élève assidu mais médiocre, James quitte très tôt l'école, sans autres atouts que sa vigueur physique et un esprit prompt à saisir sa chance. À dix-sept ans, il est manutentionnaire dans une entreprise d'épicerie en gros. Les conditions de travail y sont épuisantes. Avec quelques camarades, le jeune Hoffa déclenche une grève surprise, qui réussit, prenant de court l'administration. En octobre 1931, la petite section d'entreprise s'affilie à la centrale de l'American Federation of Labor. Ce début remarqué attire sur lui, l'année suivante, l'attention des teamsters, le syndicat des camionneurs ; il est embauché par leur bureau de Detroit comme organisateur, c'est-à-dire recruteur, tâche qui à l'époque exige du nerf et du muscle. Les patrons transporteurs – surtout dans une branche où domine la petite entreprise – sont loin d'être acquis aux négociations paritaires. Les confrontations tournent fréquemment à la bagarre, et parfois les forces de l'ordre, au service du statu quo social, doivent intervenir. Hoffa excelle à prendre les coups et à les rendre.
Son obstination et sa pugnacité font merveille. Son autorité naturelle aidant, il devient le patron d'un des sièges les plus importants du syndicat des teamsters, dans la région du haut Middle West.
De 1940 à 1957, Hoffa, qui n'a pas eu à revêtir l'uniforme durant la Seconde Guerre mondiale, ne cesse de gravir les échelons de la hiérarchie particulièrement ramifiée et opaque d'un syndicat dont les méthodes et la gestion sont si proches de celles d'un « racket » qu'elles enverront en prison nombre de ses dirigeants.
1957 est l'année où les teamsters, qui travaillent sans relâche à étendre leur empire par annexions brutales aux dépens, s'il le faut, d'autres syndicats dûment constitués, se font exclure de la centrale ouvrière A.F.L.-C.I.O. C'est aussi l'année où triomphe Hoffa.
En octobre, il est choisi pour succéder à Dave Beck – et il est lavé par un tribunal fédéral des accusations portées contre lui par la commission sénatoriale d'enquête sur la corruption dans les syndicats, présidée par le sénateur McClellan. Hoffa passe de rudes moments à la barre de cette commission où siège le sénateur John F. Kennedy, tandis que son frère Robert anime avec une fougue vindicative l'équipe de détectives et de juristes qui rassemble les pièces de ce procès à grand spectacle.
Le duel qui oppose dès lors les Kennedy à Hoffa se prolongera jusqu'à ce que, de meurtres en mystères, les combattants soient éliminés. À partir de 1962, et pendant dix ans, Hoffa passe le plus clair de son temps, au milieu de ses avocats et conseillers, au prétoire, puis, finalement, derrière les barreaux. Devant le tribunal de Chattanooga (Tennessee), Hoffa est reconnu coupable, le 4 mars 1964, sur la foi de preuves accablantes – y compris la déposition d'un indicateur infiltré dans son entourage immédiat –, d'avoir cherché à influencer le jury de Nashville qui, deux ans plus tôt, avait rendu un verdict « blanc » dans une sordide affaire de pots-de-vin. Le code américain ne plaisante pas avec la subornation de jurés. Hoffa est condamné à huit ans de prison ferme. Toujours en 1964, une instance fédérale de Chicago le condamne à cinq ans pour machinations financières frauduleuses. Les deux sentences ne seront pas confondues : Hoffa a treize ans de prison devant lui.
On comprend qu'il se soit débattu pour obtenir révision et cassation. La Cour suprême confirme[...]
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Écrit par
- Alain CLÉMENT
: chef de la rubrique Amérique du Nord au journal
Le Monde
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