ADAMS JOHN (1947- )
Retour à la tonalité
Parmi les premières compositions de John Adams, notons un Quintette avec piano (1970), American Standard, pour ensemble de chambre non spécifié (1973), Grounding, pour six voix solistes, trois saxophones et live electronics (électronique en direct, 1975), Onyx, pour bande magnétique (1976).
Les œuvres de la fin des années 1970 vont peu à peu affirmer sa véritable personnalité. La pulsation jubilatoire, le raffinement de l'orchestration, le parfait équilibre instrumental sont les marques les plus profondes de son style. Inscrit dans la large mouvance minimaliste, il fait partie de la nouvelle génération, empruntant et développant les voies ouvertes par Philip Glass, Steve Reich et Terry Riley. Adams inclut dans ses pages de savantes orchestrations en assimilant l'héritage de Stravinski, de Sibelius et de Copland. Ses œuvres reposent en partie sur une application à l'orchestre des effets que procure la musique électronique. Les éléments rythmiques et harmoniques semblent issus des combinaisons que l'on peut obtenir avec un synthétiseur et un séquenceur. Les deux chefs-d'œuvre pour piano que sont Phrygian Gates (1977) et China Gates (1977) illustrent une technique analogue au principe de déclenchement utilisé en musique électronique (gate) : une cellule de plusieurs notes est alliée à une brusque modulation suivant un processus périodique. Cette manière agit sur l'auditeur comme le flux continu d'une brume sonore, à la fois ambiante et rêveuse. Christian Zeal and Activity, pour ensemble de chambre non spécifié (1973), superpose un texte enregistré – le sermon d'un pasteur – à une structure polyphonique tonale. Grâce à une approche apparemment libre de toute contrainte stylistique, Adams arrive à susciter l'émotion. Le parti pris du compositeur est résolument tourné vers la redécouverte du sens de la tonalité : « La tonalité est une force fondamentale, dramatique, organisatrice. Dès le moment où il a essayé de rompre cette force, Schönberg a privé la musique de sa cohérence essentielle et naturelle. » Shaker Loops, pour sept instruments à cordes (3 violons, alto, 2 violoncelles, contrebasse, 1978 ; arrangé pour orchestre à cordes en 1983), fait référence à la fois à une secte dissidente des Quakers, dont les membres sont appelés péjorativement des Shakers (to shake, « secouer »), et aux boucles (loops) mélodiques et rythmiques qui sont utilisées dans l'œuvre. Cette magnifique pièce définit, à elle seule, la nouvelle génération minimaliste des années 1980. Grand Pianola Music (1982), sorte de concerto pour deux pianos usant d'un retard entre les deux voies solistes cher à Steve Reich, comme Fearful Symmetries, pour orchestre (1988), à la folle énergie cinétique, sont les pendants de The Wound Dresser, pour baryton et orchestre (1988), d'une sombre retenue, sur un texte de Walt Whitman, et de Harmonielehre (1984-1985), au titre énigmatique se référant au traité de Schönberg. Autre référence symbolique au Viennois novateur (celui, en définitive, par qui est arrivé, comme un choc en retour, le scandale minimaliste américain), la Symphonie de chambre (1992), qui doit autant aux dessins animés des années 1950, dans lesquels la musique agressive est sans cesse agitée par une force extérieure, qu'à la partition éponyme d'Arnold Schönberg, et, dans une moindre mesure, à l'influence de Stravinski, d'Hindemith et de Milhaud.
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Écrit par
- Patrick WIKLACZ : journaliste
Classification
Médias
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