BRIGHT JOHN (1811-1889)
Homme politique britannique de premier plan et grande figure du libéralisme, John Bright est un industriel du Lancashire. Appartenant à une famille de quakers, il a reçu une bonne éducation, mais n'est pas passé par les universités ; autodidacte, il a marqué l'éloquence parlementaire par la qualité de ses références littéraires et historiques. Sa vie publique commence en 1830 lorsqu'il se passionne pour la campagne réformatrice du radical Henry Hunt ; elle prend un tournant décisif en 1838 lorsqu'il adhère à la Ligue contre les Lois sur le blé et s'associe ainsi dans une longue et amicale collaboration avec Richard Cobden. Il est élu pour la première fois aux Communes en 1843 en tant que député de Durham, siège qu'il échange bientôt contre celui de Manchester avant de devenir pendant plus d'un quart de siècle, à partir de 1858, le représentant de Birmingham. Il lui faudra attendre 1869 pour occuper un premier poste ministériel dans un cabinet Gladstone, au Board of Trade, et il sera encore chancelier du duché de Lancastre en 1873.
Individualiste déterminé, John Bright a été d'autant plus écouté qu'il a voulu toujours suivre ce que lui dictaient une conscience exigeante et un sens religieux de ses responsabilités. Non conformiste, il a été l'homme de l'égalité religieuse, le pourfendeur des privilèges de l'Église d'Angleterre, en particulier de ses dîmes, l'avocat d'une séparation de l'Église et de l'État qu'il appuiera vigoureusement aussi dans le cas de l'Église d'Irlande en 1869 ; il se prononce au Parlement en faveur du droit des juifs, puis des athées de prêter un serment non chrétien et d'être admis à sièger aux Communes ; il va jusqu'à critiquer des mesures si elles risquent de favoriser certaines dénominations, et c'est le cas en 1874 lorsqu'il attaque la loi Forster sur l'enseignement primaire. Libéral, il a été, avec Cobden, le grand apôtre des vérités de l'école de Manchester, a considéré le libre-échange comme le remède de tous les maux économiques, a favorisé par ses campagnes l'adoption de la grande loi de 1846 qui a aboli les lois protectionnistes, de même qu'il a énergiquement soutenu à partir de 1860 la politique de traités de libre-échange inaugurée par le traité Cobden-Michel Chevalier ; par contre, il se méfie de toute intervention de l'État dans l'économie et n'a que soupçons et doutes à l'encontre des lois sociales : il a lutté contre le chartisme, contre la réduction de la journée de travail des adultes, contre les réformes disraéliennes de 1875. Persuadé de la grandeur des classes moyennes, il a souhaité étendre le droit de vote à tous les bourgeois, mais il a rapidement perçu la nécessité d'une démocratisation réelle et a plaidé en faveur de réformes fondamentales en 1860, puis jusqu'à l'adoption de la loi électorale de 1867, et à nouveau en 1884-1885 ; un temps persuadé par John Stuart Mill de soutenir la cause du vote des femmes, il y renonce assez vite, parce qu'il accorde une place prépondérante à la vie de famille et au rôle de la femme au foyer ! Très tôt conscient de la gravité du problème irlandais, il s'est prononcé en 1846-1847 pour une réforme agraire dans l'île ; il ne va pas jusqu'à admettre la revendication autonomiste ou indépendantiste et se sépare nettement de Gladstone en 1886 sur l'enjeu du Home Rule. Pacifiste déterminé, il a lutté avec beaucoup de courage contre ce qu'il considérait comme une hystérie nationaliste au temps de la guerre de Crimée et n'a pas cessé de dénoncer la nocivité des principes de la politique de Palmerston, dont celui de l'équilibre des puissances ; très hostile à toute politique d'armement, il n'admet aucune alliance permanente, n'écartant[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Roland MARX : professeur à l'université de Paris-III-Sorbonne nouvelle
Classification