Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CARPENTER JOHN (1948- )

John Carpenter est un cinéaste atypique parmi les artistes de sa génération. Alors qu'il est devenu courant, depuis le début des années 1970, de revivifier le cinéma de genre, et le film fantastique en particulier, par le recours à l'ironie et au second degré (Joe Dante, Sam Raimi et bien d'autres innervent leurs films d'une forte dose d'humour), l'auteur de Halloween nous présente comme virtuellement plausible tout ce qu'on voit à l'écran. Cette faculté de persuasion fait de lui un néo-classique, un continuateur contemporain d'Howard Hawks.

John Carpenter est né en 1948 à Carthage (État de New York). Contrairement à d'autres metteurs en scène de son époque, qui transitaient par l'assistanat et les petits métiers de studios avant d'accéder à la réalisation, il a fait des études de cinéma. Lorsqu'il entre en 1968 à l'U.S.C. (University of South California), il est déjà cinéphile depuis l'enfance (il admire beaucoup le film de Jack Arnold, It Came from outer space[Le Météore de la nuit], 1953) et a réalisé de petits essais en 8 mm. Il a l'opportunité, dans son école, de rencontrer des maîtres comme Orson Welles, Howard Hawks (son cinéaste préféré), John Ford ou Alfred Hitchcock. Avec quelques amis, il coréalise The Resurrection of Bronco Billy, qui reçoit l'Oscar du meilleur court-métrage en 1970. Son film de fin d'études, Dark Star (1974), un pastiche de 2001, l'Odyssée de l'espace de Kubrick, ne laisse rien présager de la suite de sa carrière. C'est un film loufoque, bourré d'humour.

Le genre que le jeune homme apprécie à l'époque est le western. Assault on Precinct 13 (Assaut, 1976), son premier film professionnel, est une transposition contemporaine du Rio Bravo d'Howard Hawks. Ce film et le suivant, Halloween (La Nuit des masques, 1978), jettent les bases du cinéma carpentérien. Un goût des espaces clos, le filmage en CinémaScope soutenu par une musique lancinante écrite par Carpenter lui-même, des effets soigneusement calculés nous entraînent dans un univers claustrophobe qui oriente naturellement le cinéaste vers le fantastique. Halloween, aussi effrayant dans sa finalité qu'économe par ses moyens (pas de sang, seulement la vue d'un couteau effilé), renouvelle totalement le genre. Tout y est présenté de manière quasi documentaire, l'étrangeté et la banalité ayant le même statut dans l'économie du récit, à l'instar des romans de Stephen King. Le mal ou l'anormal sont décrits comme des choses réelles et qui se passent d'explications.

Chez John Carpenter (Halloween ; Prince of Darkness[Prince des ténèbres, 1987] ; They Live [Invasion Los Angeles, 1987] ; Vampires, 1997), le fantastique est traité au premier degré, avec peu d'humour. L'anecdote étant donnée comme plausible, ce sont ses effets sur le spectateur qui nous intéressent. Dans Halloween, le regard de ce dernier épouse tour à tour celui du tueur et de la victime. Le film assume ici une fonction psychanalytique primordiale. La théoricienne féministe Carol J. Clover fait de Carpenter l'inventeur de la final girl, une femme peu sexuée qui triomphe du monstre masculin qui la poursuit, ce qui provoque une rupture dans la répartition des rôles et des genres (gender signifiant aussi bien genre que catégorie sexuelle en anglais).

<em>The Thing</em>, J. Carpenter - crédits : Universal/Turman-Foster/ CIC/ BBQ_DFY/ Aurimages.

The Thing, J. Carpenter

Le metteur en scène n'est pas à une contradiction près. Sa réputation de grand manipulateur se fonde seulement sur quelques films : Assaut, Halloween, Escape from New York (New York 1997, 1982), et sa suite Escape from L.A. (Los Angeles 2013, 1996) qui imposent, peu ou prou, une grille de lecture à l'ensemble de son œuvre. Pourtant, cette dernière est très variée, quoique inscrite majoritairement dans le registre du fantastique, si l'on soustrait Starman, 1995, où l'extraterrestre[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Média

<em>The Thing</em>, J. Carpenter - crédits : Universal/Turman-Foster/ CIC/ BBQ_DFY/ Aurimages.

The Thing, J. Carpenter

Autres références

  • GOTHIQUE LITTÉRATURE & CINÉMA

    • Écrit par
    • 6 313 mots
    • 5 médias
    ...des cinéastes et des scénaristes de télévision (la série Penny Dreadful). Terry Gilliam développe un univers gothique dans Tideland (2006), tout comme John Carpenter, dont les films inspirés de l’univers lovecraftien (The Thing, Prince of Darkness, In the Mouth of Madness) reposent sur un huis clos...