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CHADWICK JOHN (1920-1998)

Après avoir commencé des études de philologie classique à Cambridge, John Chadwick fut employé quelque temps pendant la Seconde Guerre mondiale par les services secrets de la marine britannique à Alexandrie chargés de décrypter les messages italiens. Cette expérience a joué un grand rôle dans sa formation. John Chadwick a souvent souligné qu'un code secret finissait toujours par « craquer », pourvu que l'on dispose d'un nombre suffisant de documents et que l'on étudie soigneusement les séquences récurrentes. Dès 1946, après avoir obtenu son diplôme à Cambridge, tout en commençant une brillante carrière de philologue classique, Chadwick s'intéresse aux écritures égéennes, notamment à la plus récente d'entre elles, le Linéaire B, attesté à la fois à Cnossos en Crète vers 1400 avant J.-C. et à Pylos en Messénie vers 1200. Le 10 juillet 1952, il entendit le jeune architecte Michaël Ventris expliquer à la B.B.C. qu'il était « arrivé à la conviction que le Linéaire B était un syllabaire notant une forme archaïque de grec ». Pendant quatre jours, Chadwick appliqua la grille proposée par Ventris à un certain nombre de textes : non seulement il découvrit plusieurs mots grecs non signalés par Ventris, mais il nota que le grec ainsi révélé était exactement la forme très archaïque de dialecte arcado-chypriote qu'un linguiste pouvait s'attendre à trouver dans le monde grec cinq siècles avant Homère. Convaincu de la validité du déchiffrement, Chadwick écrivit à Ventris pour lui proposer sa coopération « en tant que pur philologue » ; ainsi commença une collaboration scientifique de quatre ans qui prit fin avec la mort de Ventris lors d'un accident de la route en 1956.

Les deux hommes présentèrent leurs découvertes dans un article du Journal of Hellenic Studies de 1953 qui fit grand bruit, « Evidence for Greek Dialect in the Mycenaean Archives ». L'importance historique du déchiffrement était considérable : il montrait non seulement que les Mycéniens étaient des Grecs, ce dont certains doutaient en 1953, mais que le palais crétois de Cnossos était occupé par des Grecs mycéniens à l'époque de sa dernière grande destruction, ce qui remettait en question les théories d'Arthur Evans.

L'épreuve de vérité qui permet d'apprécier la validité d'un déchiffrement, c'est l'apparition de nouveaux documents. Au printemps de 1953, le fouilleur américain de Pylos, Carl Blegen, entreprit l'étude des tablettes trouvées l'automne précédent. L'une d'entre elles inventoriait des trépieds et des vases : le pictogramme des trépieds était précédé du mot ti-ri-po, tripous, « trépied », les pictogrammes des vases étaient précédés des adjectifs « à trois anses », « à quatre anses », « sans anse ». Il y avait parfaite concordance entre les pictogrammes et le texte en syllabogrammes lu selon la grille de Ventris. Il était difficile d'imaginer une confirmation plus éclatante du déchiffrement, et la « tablette des trépieds » emporta la conviction de la plupart des spécialistes.

Ventris et Chadwick entreprirent alors d'exposer de manière détaillée le système graphique du Linéaire B, les particularités linguistiques du grec mycénien, et surtout la société mycénienne révélée par les tablettes déchiffrées. Documents in Mycenaean Greek (Cambridge, 1re éd. 1956 ; 2e éd. avec un commentaire additionnel de Chadwick, 1973), qui présente en translittération, traduit et commente plus de 300 textes, demeure l'ouvrage majeur pour toute étude sur le monde mycénien. Un peu plus tard, Chadwick retraça l'histoire du déchiffrement dans un livre qui se lit comme un roman policier, Le Déchiffrement du Linéaire B (Cambridge, 1958, trad. franç. 1972).

Pendant quarante-cinq ans, John Chadwick[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur d'histoire grecque à l'université de Paris-X-Nanterre

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Autres références

  • ACHÉENS

    • Écrit par
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