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KENNEDY JOHN FITZGERALD (1917-1963)

Éviter l'holocauste

Prisonniers anticastristes, 1961 - crédits : Sovfoto/ Universal Images Group/ Getty Images

Prisonniers anticastristes, 1961

L'héritage d'Eisenhower était, ou paraissait, bien lourd. Pendant sa campagne électorale, Kennedy avait affirmé que les États-Unis étaient en train de perdre la course aux armements nucléaires : le missile gap (en fait imaginaire) risquait d'encourager l'U.R.S.S. à se montrer agressive. Une erreur de calcul soviétique à propos de Berlin-Ouest, sans cesse menacé, pouvait déclencher une guerre mondiale. Enfin, Fidel Castro était installé à Cuba, et les services américains avaient préparé contre son régime une opération militaire dont ils garantissaient le succès. Kennedy ne perdrait-il pas son autorité encore mal assurée, aux États-Unis comme sur la scène internationale, s'il ne mettait pas à exécution les projets élaborés sous l'administration Eisenhower ? Après avoir beaucoup hésité, et imposé une révision des plans qui réduit très sensiblement la participation directe des forces américaines aux côtés des émigrés cubains, il donne, en mars 1961, le feu vert à l'opération qui se termine par la catastrophe de la baie des Cochons. Il assume la pleine responsabilité de cette défaite, et ne fera plus jamais confiance aux militaires, à la C.I.A. (Central Intelligence Agency) et au département d'État. Paradoxalement, sa popularité monte.

Retrait des fusées soviétiques de Cuba, 1962 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Retrait des fusées soviétiques de Cuba, 1962

Cet échec accroît sa hantise de l'erreur de calcul soviétique. À Vienne, en juin 1961, il essaie de persuader Khrouchtchev que les Américains se battraient pour Berlin. À la même époque, les accords de neutralisation du Laos semblent réduire les risques de conflit en Asie ; en Amérique latine, l'« Alliance pour le progrès » (1961) cherchera, en soutenant les régimes à la fois démocratiques et réformateurs, à isoler la révolution cubaine et à rendre le terrain moins favorable à qui voudrait l'imiter. La découverte, en octobre 1962, des fusées que l'U.R.S.S. était en train d'installer à Cuba montre à Kennedy que Khrouchtchev ne l'a pas compris, et que l'erreur de calcul qui l'obsède est sur le point d'être commise.

Comment réagir dans cette deuxième crise de Cuba ? Peut-être Kennedy et ses conseillers ont-ils exagéré le danger que présentaient les fusées soviétiques, ou se sont-ils mépris sur les intentions de l'U.R.S.S. La maîtrise dont a alors fait preuve le président des États-Unis, sa détermination et sa modération, son souci d'éviter à l'adversaire de perdre la face et de trouver une solution acceptable pour les deux superpuissances ont sans doute permis d'écarter la guerre. Les dirigeants soviétiques ont eux aussi alors mesuré le danger, et l'accord voulu par Kennedy peut dès lors être envisagé.

Crise de Cuba, 1962 - crédits : Central Press/ Getty Images

Crise de Cuba, 1962

Kennedy lors de la crise de Cuba, 1962 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Kennedy lors de la crise de Cuba, 1962

Après des mois de pourparlers, dans son discours prononcé le 10 juin 1963 à l'American University, Kennedy exprime clairement sa hantise et cherche éloquemment à persuader les dirigeants soviétiques de la bonne foi américaine. La conclusion (en 1963) des accords sur l'interdiction des explosions nucléaires dans l'atmosphère, puis sur la non-dissémination des armes nucléaires, les négociations sur la limitation des armements montrent que, dans ce domaine au moins, la présidence Kennedy marque un tournant ; les présidents Johnson et Nixon garderont la même orientation.

Désireux de rendre plus durable et plus profond l'intérêt que les Américains portent aux problèmes internationaux, et notamment aux pays dont ils devraient faciliter le développement, créateur du Peace Corps dans lequel des dizaines de milliers de jeunes Américains ont combattu la misère du Tiers Monde, Kennedy est aussi l'homme qui a décidé de renforcer la présence américaine au Vietnam. Aurait-il, mieux que Johnson, évité l'enlisement qu'a été, à partir de 1964, l'escalade ? C'est ce que pensent ses admirateurs ; mais rien ne permet de l'affirmer.[...]

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Écrit par

  • : ancien directeur scientifique de la Fondation nationale des sciences politiques.

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Médias

Prisonniers anticastristes, 1961 - crédits : Sovfoto/ Universal Images Group/ Getty Images

Prisonniers anticastristes, 1961

Retrait des fusées soviétiques de Cuba, 1962 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Retrait des fusées soviétiques de Cuba, 1962

Crise de Cuba, 1962 - crédits : Central Press/ Getty Images

Crise de Cuba, 1962

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