JACKSON JOHN HUGHLINGS (1835-1911)
Né dans un canton du Yorkshire où son père avait une petite propriété, John Hughlings Jackson commença, à dix-sept ans, ses études de médecine à York, dans l'école où professait Thomas Leycock. Auprès de lui, il s'intéressa (après avoir été tenté de poursuivre ses études en philosophie) à ce qui devait devenir le sens de toute son œuvre : les rapports du cerveau et de la pensée. Il publia, en 1859, un livre en deux tomes, Brain and Mind, et obtint son diplôme de doctorat à l'université de Saint Andrews, cette même année. Il partit alors pour Londres ; en 1863, il fut nommé médecin assistant au National Hospital for Nervous Diseases qui venait d'être fondé. Quatre ans plus tard, il fut nommé chef de service de cet établissement qu'il ne quitta qu'au moment de sa retraite en 1896. À partir de 1864, il eut aussi un service et un enseignement au London Hospital.
Au cours d'une vie extraordinairement laborieuse, il publia plus de trois cents écrits et mémoires dont la liste figure à la fin des Selected Writings publiés en 1932.
Son œuvre est d'abord caractérisée par son orientation vers la neuro-physio-pathologie (« Croonian Lectures », Royal College of Physicians (1884) ; articles dans Lancet, Medical Times and Gazette, Brain, Medical Press and Circular) ; mais ce grand neurologue, si connu pour ses travaux sur l'épilepsie et l'aphasie, ne cessait, à l'époque des grands débats sur les localisations cérébrales, de s'interroger sur les « centres nerveux supérieurs » (highest level centers of the nervous system). Se fondant sur le système de pensée évolutionniste (Spencer, Darwin), il pensait que les affections du système nerveux ne peuvent se comprendre qu'en se référant aux niveaux de l'évolution de ses fonctions. Celle-ci implique, en effet, un progrès allant du plus automatique au moins automatique.
Mais — embarrassé par sa position métaphysique dualiste —, Jackson (tout en décrivant par exemple dans les états crépusculaires de l'épilepsie psychique les troubles de la conscience comme un modèle de dissolution des « centres supérieurs ») s'est toujours défendu de confondre brain et mind. Ceux qui, parmi les neurologues, ont repris ses idées essentielles (Pick, Head, Sherrington) ont à peu près généralement adopté son « principe de concomitance ». Celui-ci peut être appliqué sans difficulté aux dissolutions locales du système nerveux, objets de la pathologie dite « neurologique », mais il n'en est plus de même dans le cas des « facteurs de folie » conduisant aux troubles mentaux. Et pourtant, un « néo-jacksonisme » (H. Ey et J. Rouart, 1936) a paru et paraît même de plus en plus capable (Ey, 1974) de repenser entièrement la psychiatrie, notamment en reprenant l'idée fondamentale de Jackson : la complémentarité de la condition négative (la dissolution fonctionnelle de l'intégration assurée par le système nerveux central) et de la manifestation positive (les symptômes qui se manifestent sous forme de délires, d'affects, d'hallucinations, de croyances libérées du contrôle ou du « refoulement » des instances supérieures).
Reprises et révisées, les conceptions de Jackson permettent de s'affranchir du dualisme postulé par l'opposition du psychique (psychogenèse, psychanalyse, modèle psychodynamique) et du physique (pathologie cérébrale, modèle mécaniste) pour proposer un modèle organo-dynamique de la psychiatrie.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Henri EY : ancien chef de clinique à la faculté de médecine de Paris, médecin chef à l'hôpital psychiatrique de Bonneval
Classification
Média
Autres références
-
CONSCIENCE
- Écrit par Henri EY
- 10 480 mots
- 1 média
...système nerveux que l'idée d'un centre de la conscience s'est imposée en même temps qu'elle s'engageait ainsi dans l'impasse de la concomitance. Pour H. Jackson, en effet, père de toutes les théories neurophysiologiques des Temps modernes, le modèle du système nerveux était essentiellement moteur ou sensori-moteur,... -
ÉPILEPSIE
- Écrit par Henri GASTAUT et François MIKOL
- 6 164 mots
- 3 médias
...à partir de laquelle elles peuvent s'étendre (pouce, puis main, puis bras, puis hémiface correspondante par exemple) suivant une marche décrite par H. Jackson (c'est pourquoi ces crises sont souvent dites « jacksoniennes ») ; les crises versives, caractérisées par une déviation conjuguée des... -
EY HENRI (1900-1977)
- Écrit par Charles MELMAN
- 1 512 mots
Né à Banyuls-dels-Aspres dans les Pyrénées-Orientales, Henri Ey est mort le 6 novembre 1977, peu après une ultime journée de travail à la bibliothèque de l'hôpital Sainte-Anne à Paris, lieu qu'il privilégiait pour l'avoir dirigé, aménagé et enrichi. Dans un pays où titre universitaire vaut renommée,...
-
NEUROLOGIE
- Écrit par Encyclopædia Universalis , Raymond HOUDART , Hubert MAMO et Jean MÉTELLUS
- 30 259 mots
- 7 médias
...Hammond individualise l'athétose. Toujours à la fin du xixe siècle, l'Angleterre voit surgir une pléiade de brillants neurologues, parmi lesquels Huglinghs Jackson (1835-1911), neurologiste inspiré, qui observe les phénomènes de libération, en même temps qu'il précise l'évolution et la dissolution...