IMMENDORFF JORG (1945-2007)
Jorg Immendorff est né le 14 juin 1945 à Bleckede en Basse-Saxe. Après s'être consacré quelques années à l'enseignement en tant qu'instituteur, il prend des cours de peinture de paysage auprès de Teo Otto, avant d'intégrer l'académie des beaux-arts de Düsseldorf en 1963. Jusqu'en 1964, il y suit les leçons de Joseph Beuys ; mais il est renvoyé à cause de ses convictions maoïstes et de ses actions néo-dadaïstes. Cet engagement politique et son goût pour la protestation contre la situation politique et sociale de l'Allemagne le conduisent à fonder le mouvement LIDL en 1968. LIDL académie, LIDL espace, LIDL sport, LIDL théâtre : le terme imaginaire est autant un concept de discussion qu'un cri de ralliement pour l'agit-prop des peintres qui, comme lui, se posent la question du rôle de l'art dans la société. Il est difficile dès lors de ne pas penser aux positions politiques de dada en Allemagne au début des années 1920 et à leur esprit de provocation. À l'instar des actions de ce mouvement, Immendorff organise des happenings et dérange les bonnes consciences. En 1968, il est arrêté pour avoir manifesté devant le Parlement à Bonn : il marchait entravé par une pierre attachée à la cheville et peinte aux couleurs du drapeau allemand. Il proteste également contre la guerre au Vietnam, les grandes pollutions, les inégalités sociales et intègre ces sujets dans sa peinture figurative, brutale et narrative.
En 1976, Jorg Immendorff rencontre le peintre est-allemand A.R. Penck et fonde avec lui l'Alliance d'action R.F.A.-R.D.A. Dans ce contexte, il commence une série de tableaux, Café Deutschland, devenue emblématique de son art. En seize toiles de grand format et peintes jusqu'en 1982, Immendorff affiche ses combats politiques et son refus de la scission de l'Allemagne, stigmatisant le Mur, les barbelés, mélangeant les figures de l'histoire de l'art – Marcel Duchamp, Max Ernst, Kurt Schwitters, Max Beckmann, Joseph Beuys, David Salle, A.R. Penck – aux grandes figures révolutionnaires, de Lénine à Mao en passant par Staline. Ses compositions saturées, violentes et acides, empruntent au graphisme de la bande dessinée comme à la peinture de la nouvelle objectivité, n'hésitent pas à verser dans le kitsch, mais sont estampillées « nouveaux fauves » ou « néo-expressionnisme allemand ». Sous ces appellations, les critiques rassemblent des peintres comme Albert Oehlen, Martin Kippenberger, A.R. Penck, Walter Dahn. Cependant, l'étiquette gêne Immendorff. Cette première série de seize toiles, où le peintre apparaît représenté en homme chauve ou en singe, est exposée pour la première fois en Allemagne en 1982 ; avant de traverser l'Atlantique et d'être consacrée par une exposition à la galerie Sonnabend à New York. Dans les années 1980, sa peinture résonne d'un symbolisme appuyé où se multiplient les réminiscences surréalistes, notamment dans la série Café de Flore réalisée de 1987 à 1992, où il fustige l'art moderne.
Immendorff jouit alors d'une reconnaissance certaine et réalise plusieurs décors de scène pour le théâtre de Salzbourg. Dans les années 1990, il s'essaie même à la sculpture monumentale en érigeant Elbquelle, un tronc d'arbre dépouillé en acier de 25 mètres de hauteur et d'un poids de 234 tonnes pour la ville allemande de Riesa (1999). Cette reconnaissance institutionnelle s'effectue aussi sur le plan académique. De l'école municipale d'art de Francfort, où il fut nommé en 1989, il passe en 1996 à la prestigieuse académie des beaux-arts de Düsseldorf, où il avait lui-même étudié. En 1997, il reçoit le prestigieux prix Marco décerné par le musée d'Art contemporain de Monterey au Mexique et, en 1998, il est décoré de la médaille du mérite de la République[...]
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Écrit par
- Bénédicte RAMADE : critique d'art, historienne de l'art spécialisée en art écologique américain
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