AMADO JORGE (1912-2001)
Pour d'innombrables lecteurs, l'œuvre de ce romancier, traduite en plus de quarante langues, est devenue synonyme de Brésil. Ce succès lui vient d'un talent de conteur incomparable, qui est la clef de l'unité d'une production dont les accents ont évolué durant un demi-siècle de création. Depuis les récits nerveux et lyriques, directement impliqués dans le débat politique des années trente, jusqu'aux histoires récentes, luxuriantes et débordantes d'humour et de sensualité, Amado donne la parole au peuple de Bahia. L'enracinement dans une terre de métissage racial et culturel, le foisonnement de personnages savoureux, la trame implacable ou fantaisiste de leurs combats ou de leurs aventures nourrissent une vision à la fois engagée, amusée et attendrie des passions humaines.
La voix d'un peuple
Un père ensanglanté tombe de son cheval en protégeant son enfant : telle est la scène fondatrice de la vie du romancier Jorge Amado, né à Itabuna dans l'État de Bahia en 1912. En effet, la conquête violente des terres du cacao, cadre de sa petite enfance, traverse son œuvre depuis Le Pays du carnaval, passant par Tocaia Grande jusqu'à L'Invitation à Bahia. Cet enracinement va de pair avec la découverte de la littérature. Jeune homme, Amado part pour la ville de Salvador, l'ancienne capitale du pays alors en décadence par rapport à sa splendeur passée. Là, il fait ses premières armes de journaliste ; militant communiste, il s'engage dans la voie du roman prolétarien. Dès 1931, Amado s'installe à Rio de Janeiro où son premier roman publié, País do carnaval, est bien reçu. Tout en étudiant le droit, il continue à écrire, et son second roman, Cacau, saisi par la police de la dictature de Getulio Vargas, lui vaut un grand succès. Dorénavant, sa vie d'écrivain demeure indissociable de sa trajectoire politique. Membre actif de l'Aliança nacional libertadora à partir de 1935, il est mis en prison à diverses reprises (en 1936 et en 1937) et doit s'exiler en Amérique du Sud à partir de 1941. En 1945, sous un nouveau régime, il est élu député fédéral communiste, mais son mandat sera interrompu en 1948 du fait de la dissolution du parti.
Jorge Amado, qui vit d'abord à Paris puis à Prague, reçoit en 1951 le prix Staline. En 1952, il peut regagner définitivement le Brésil. Progressivement, il s'écarte du parti, et ses romans de plus en plus populaires lui valent d'être élu à l'Académie brésilienne en 1961. Depuis lors, il est devenu le symbole vivant de l'écrivain porteur de la voix de son peuple. Cela ne l'empêche pas de continuer à construire une œuvre régionaliste qui a su gagner une dimension universelle grâce au charme envoûtant des récits exotiques, à la vision politique qui la sous-tend, et à l'ouverture de son auteur sur le monde.
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Écrit par
- Mario CARELLI : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, chargé de recherche au CNRS
Classification
Média
Autres références
-
BRÉSIL - La littérature
- Écrit par Mario CARELLI , Ronny A. LAWTON , Michel RIAUDEL et Pierre RIVAS
- 12 169 mots
...Mes Vertes Années). L'ensemble est une évocation nostalgique du monde des maîtres et des esclaves, saisi à son déclin. L'importance de Jorge Amado (1912-2001), prix Staline de littérature 1959, vient du lyrisme engagé de ses premiers livres, O país do carnaval (Le Pays du carnaval...