Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

ISAAC JORGE (1837-1895)

De père israélite, l'écrivain colombien Jorge Isaac est resté marqué par le décor de son enfance, la vallée du Cauca où était établie l'hacienda paternelle. Appartenant au groupe du Mosaico qui désigne à la fois une revue et un courant littéraire, il débute en publiant des poèmes évoquant ses souvenirs d'enfance, des récits, des paysages ; il prend part aux luttes civiles qui déchirent son pays et lui inspirent des chants patriotiques, des réflexions morales ; Saulo (1881) confirme ses dons de poète. Cependant c'est son roman María (1867) qui lui valut sa renommée universelle. Ce chef-d'œuvre romantique, influencé par Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre mais aussi par Atala de Chateaubriand, est un roman autobiographique dont l'action se situe dans un paysage paradisiaque ; c'est aussi une peinture de mœurs d'une société féodale idéalisée. Éphraïm, fils d'un juif converti de la Jamaïque fixé dans la région du Cauca, revient à l'hacienda familiale avant de partir en Europe poursuivre des études de médecine. Il tombe amoureux de la pupille de son père, María, atteinte d'épilepsie. Contraint par son père à partir, il ne reverra pas María, qui meurt durant son absence. Comme dans Atala, la composante mystique est primordiale ; Isaac conserve aussi l'élément exotique, la peinture des tribus sauvages, le sens du sacré. Comme dans Paul et Virginie, le dénouement est tragique, le bonheur éphémère cède le pas à la solitude et à la mort. Par l'importance accordée au paysage, María est une œuvre romantique. L'auteur donne une vision idéalisée du Cauca, mais une vision vraie et précise ; il en est de même pour l'univers des personnages : les travaux de l'hacienda, les chevauchées dans la vallée, les portraits des êtres rustres, leur langage populaire, leur accent. María est le premier roman proclamant la réalité de la nature sud-américaine, la fusion de l'homme et du paysage dans un sentiment d'amour mystique. La délicatesse, la ferveur de la tonalité rappellent l'origine hébraïque de l'auteur qui a su harmoniser le réalisme de ses descriptions avec le romantisme des sentiments éprouvés par ses personnages.

— Sylvie LÉGER

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Autres références

  • AMÉRIQUE LATINE - Littérature hispano-américaine

    • Écrit par , , et
    • 16 963 mots
    • 7 médias
    María (1867), de Jorge Isaacs (1837-1895), se situe à l'opposé de ces violences. C'est, dans le cadre idéalisé d'un grand domaine de Colombie, l'histoire de jeunes amours idylliques auxquelles met fin la mort prématurée de la tendre héroïne. Ce récit sobre et touchant, qui côtoie,...