UTZON JØRN (1918-2008)
L'Opéra de Sydney
En 1957, Utzon est lauréat du concours international pour le nouvel Opéra de Sydney. La surprise est grande car, à trente-huit ans, il n'est guère connu, même s'il s'est signalé au Danemark et en Suède en remportant plusieurs consultations d'architecture et d'urbanisme, qui n'ont pas abouti. L'étude et la réalisation (entamée en 1959) de ce projet majeur vont l'occuper pendant dix années. Sans avoir visité Sydney, il donne au paysage de la ville et au programme du concours une réponse dont l'audace et la poésie tranchent avec les propositions des autres concurrents. Il veut ériger sur le promontoire de Bennelong, des éventails de coques blanches qui couvriraient, telles des voiles, deux salles de concert contenues dans un socle monumental en pierre, inspiré des plates-formes des architectures précolombiennes. Cette image, construite en dépit de multiples difficultés, est devenue l'emblème mondialement célèbre de la plus grande ville d'Australie.
L'intention qui anime le projet pour l'Opéra s'inscrit dans un mouvement de retour à la forme propre à la génération d'Utzon. Les jeunes architectes réagissent contre le dessèchement du modernisme de leurs aînés et parient sur de nouvelles technologies – ici les coques minces en béton armé – pour incarner leur revendication d'une plus grande liberté plastique et favoriser l'émergence d'une nouvelle architecture. Pourtant, Utzon et ses ingénieurs sont vite confrontés à l'impossibilité de construire l'Opéra sans modifier le projet. Pendant que le socle émerge lentement du sol, l'agence londonienne de l'ingénieur Ove Arup (1895-1988) échoue à calculer la géométrie des toitures lyriques qui doivent le couronner. C'est finalement l'architecte qui trouve, en 1962, une solution inédite : il propose que les coquilles soient toutes prélevées sur une même sphère théorique, ce qui rend leurs surfaces homothétiques, les rationalise et permet une réalisation économique. Les membranes galbées en béton de faible épaisseur envisagées au départ deviennent des voûtes en ogive, un assemblage d'arches elles-mêmes décomposées en segments préfabriqués. Sur le plan constructif, l'Opéra de Sydney s'apparente donc plus à une cathédrale gothique qu'aux expériences qui l'avaient d'abord inspiré, comme le fameux terminal de la compagnie TWA conçu par Eero Saarinen pour l'aéroport Kennedy de New York.
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Écrit par
- Françoise FROMONOT : architecte, maître assistant des écoles d'architecture, critique
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Média
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