CADALSO JOSÉ (1741-1782)
Vers une éthique sociale
Il serait pourtant bien exagéré de voir en Cadalso un philosophe révolutionnaire. Libéral, mais sincèrement attaché néanmoins à l'essentiel des valeurs traditionnelles, Cadalso n'a pas créé d'idées profondes et originales. Il s'est plutôt inspiré de nombreux thèmes européens pour aborder dans un certain esprit la réalité de sa propre nation. Mais l'attitude qu'il adopta face à cette réalité faisait de lui un étranger dans le milieu où il vivait. S'il n'allait pas jusqu'à remettre en cause les fondements mêmes de la société espagnole, il travaillait cependant à élaborer une image un peu moins traditionnelle de l'Espagne. Or, en choisissant ce parti pris de vérité, d'efficacité et d'utilitarisme, Cadalso se séparait de la tradition nationale des moralistes qui appréciaient les mœurs de leurs semblables hors du temps historique, débouchant le plus souvent sur une option, religieuse ou philosophique, universaliste. Guidé par l'observation et mû par son besoin de comparer, il redécouvrait le lien vivant, multiple, nécessaire, qui fait que l'individu ne peut s'isoler de la collectivité. Non d'ailleurs qu'il crût, comme beaucoup de ses contemporains étrangers ou espagnols, à la possibilité d'un progrès harmonieux et continu : son époque l'avait blessé, parfois même rejeté ; il n'était pas sûr qu'on pût trouver des solutions à tous les problèmes. Mais il tenait à vivre jusqu'au bout son éthique sociale et utilitaire, qui lui était apparue la meilleure, opposant à l'inconnu résignation et stoïcisme.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Eutimio MARTÍN : lecteur à la faculté des lettres et sciences humaines de Nice
- René PELLEN : ancien élève de l'École normale supérieure, docteur d'État, maître assistant à l'université de Poitiers
Classification