RIZAL Y ALONSO JOSÉ (1861-1896)
Issu d'une famille de notables philippins, Rizal est un brillant élève des jésuites. Bachelier en 1877, il commence des études de médecine à l'université Saint-Thomas de Manille ; il les poursuivra en Espagne sans qu'il obtienne jamais le titre de docteur en médecine, faute de présenter et de soutenir sa thèse. Cependant, il exercera comme médecin à Hong Kong et aux Philippines.
Rizal a beaucoup voyagé. Il a visité notamment le Japon et les États-Unis. De 1882 à 1887, il séjourne en Espagne, entre 1888 et 1891, en Angleterre, en France, en Belgique. Comme ce sera le cas pour tant d'autres intellectuels du Tiers Monde, c'est au contact de l'Europe que les idées de Rizal s'éveillent, qu'il découvre la liberté, lui qui a déjà souffert dans sa patrie de l'arbitraire et de la discrimination colonialistes. Rizal exalte l'Europe, « la belle, la libre, la cultivée, la civilisée ». C'est en Europe (et en espagnol) qu'il écrit et publie ses deux romans qui sont ses œuvres les plus connues, Au pays des moineaux (Noli me tangere, 1886) et La Flibusterie (El Filibusterismo, 1891). Mais, comme beaucoup d'intellectuels du monde colonial, il se sent, lui aussi, partagé entre les deux cultures, entre l'Est et l'Ouest, sans cesse tenté de quitter l'un pour l'autre. Découragé par son insuccès en Europe, par les intrigues de ses compatriotes établis en Espagne, qui ne sont pas disposés à le mettre à leur tête, Rizal se rend aux Philippines, s'y sent incompris, exposé à l'hostilité des autorités et repart, après quelques mois, pour l'Europe. En 1891, il s'établit à Hong Kong, puis rentre à Manille où à cause de son action les autorités le font déporter presque aussitôt à Dapitan (Mindanao). Il y reste jusqu'en 1896. À la suite de la révolte qui éclate le 25 août de la même année et que Rizal n'a pas voulue, qu'il a même condamnée, il est, après un simulacre de procès, condamné à mort.
Rizal entend mener la lutte pour l'avancement intellectuel et moral de son peuple. Il participe au groupe La Solidaridad créé en Espagne, en 1888, par les intellectuels philippins et contribue à la publication du périodique du même nom. Il considère ses romans comme des moyens de combat social. La Liga Filipina, qu'il crée en 1892 sous la forme d'une association secrète calquée sur le modèle maçonnique, se propose d'obtenir des réformes économiques et sociales. Elle ne groupe que des membres de la nouvelle couche moyenne et disparaît avec son fondateur, exécuté à Manille le 30 décembre 1896.
Rizal n'était pas un homme d'action mais un intellectuel. Déiste, franc-maçon, il combat les congrégations et les moines espagnols, en raison de leur obscurantisme, de la tyrannie qu'ils exercent, de leur refus de céder ne serait-ce qu'un peu de place à la petite et naissante intelligentsia indigène. Rizal se méfie du peuple qui, à son avis, ne deviendra une nation que grâce à l'éducation et à la jouissance préalable d'un minimum de libertés. Sans doute prévoit-il qu'à la longue le colonialisme disparaîtra. Mais dans l'immédiat, et même à moyen terme, il se contente de réclamer des réformes : que la métropole consente à rappeler les moines espagnols, à pratiquer une politique d'assimilation, à proclamer et faire respecter l'égalité de tous devant la loi et à abolir toutes les discriminations, à introduire la liberté de la presse, de réunion et d'expression ainsi qu'un système d'éducation moderne et libre, à organiser la représentation de l'archipel aux Cortès et le recrutement de fonctionnaires locaux par des concours ouverts à tous.
Rizal a toujours été opposé au recours à la révolution, à l'insurrection. C'est sans doute pour cette raison que, dès[...]
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Écrit par
- Georges FISCHER : directeur de recherche au C.N.R.S.
Classification
Autres références
-
PHILIPPINES
- Écrit par Philippe DEVILLERS , Encyclopædia Universalis , Manuelle FRANCK , William GUÉRAICHE , Lucila V. HOSILLOS et Jean-Louis VESLOT
- 21 456 mots
- 17 médias
En outre, un jeune écrivain, José Rizal, allait parallèlement exercer une influence dans le même sens. Issu d'une famille de propriétaires fonciers, brillant élève, il était venu en 1882 poursuivre ses études de médecine en Espagne. Il visita aussi divers pays d'Europe, où il fréquenta les milieux libéraux....