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NADJ JOSEF (1957- )

Josef Nadj est non seulement un danseur, un chorégraphe et le directeur du Centre chorégraphique national d’Orléans, mais il est aussi un dessinateur, un sculpteur et un photographe remarqué. Quel que soit son support, il nous entraîne dans un imaginaire marqué par une esthétique caractéristique d’une « Mitteleuropa » en passe de disparaître.

De la Hongrie à la France

Quand Josef Nadj – né en 1957 à Kanjiža, en Voïvodine (alors province autonome de la Yougoslavie, aujourd'hui partie intégrante de la Serbie) – quitte Budapest pour Paris en 1980, il ne peut deviner qu'il deviendra un grand chorégraphe. Il faut avouer que sa formation initiale ne le destinait pas à cette carrière. Féru de littérature, il hésite avant de se décider à suivre des études d'histoire de l'art et de musique qui le conduisent tout d'abord à l'université de Budapest, en 1977, où il noue ses premiers contacts avec le cinéma et le théâtre. Il a suivi, comme la plupart des garçons de son pays, une formation de lutteur, mais il se distingue par son attirance pour les arts martiaux. Chemin faisant, il suit des cours d'expression corporelle, de théâtre et de mime enseignés par un maître polonais proche du théâtre du mouvement. C'est sur les conseils de ce dernier qu'il part pour Paris. Là, il suit d'abord les cours de mime à l'École internationale de mimodrame de Marcel Marceau de 1980 à 1982, puis, de 1982 à 1983, ceux de l'école d'Étienne Decroux. Passionné par le geste, il s'intéresse très vite à la danse. À Paris, il essaie de tout voir, de tout connaître, du ballet classique aux tentatives les plus contemporaines. Il prend des cours de danse, avec boulimie, s'intéressant moins à la technique qu'à la sensibilité du geste. Tout va alors très vite. Il rencontre le chorégraphe Lari Leong qui l'engage immédiatement. Il découvre ensuite les univers chorégraphiques de Sidonie Rochon, François Verret, Mark Tompkins et Catherine Diverrès, et participe à leurs créations. Parallèlement, il donne des cours de danse à Aulnay-sous-Bois, en banlieue parisienne, puis fonde sa propre compagnie en 1986, Théâtre Jel (terme signifiant « signe » en hongrois), avant de devenir directeur du Centre chorégraphique national d’Orléans en 1995.

En 1987, son premier essai chorégraphique, Canard pékinois, est un coup de maître. Tout un univers se déploie : ses emboîtements, ses chausse-trapes, ses constructions gestuelles. On y voit des personnages affairés et inquiets aux physiques biscornus, des passages qui ne mènent nulle part… Paris découvre Josef Nadj et toute une esthétique caractéristique de la Mitteleuropa. Dans ses spectacles baignés d'une atmosphère crépusculaire en perpétuelle mutation, le grotesque bascule dans l'angoisse. Des personnages émergent de la pénombre. Une scénographie malicieuse travaille les matériaux et les techniques de sorte que les hommes ressemblent à des objets et les objets semblent animés d'intentions parfois peu louables. Tout est prêt à se dérober, tout bascule de manière inéluctable, surtout les corps, toujours au bord d'un déséquilibre tant physique que mental. Un monde aussi noir que l'humour de ce maître en illusions qui n'en finit pas d'interroger les mystères de l'existence.

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Écrit par

  • : écrivaine, journaliste dans le domaine de la danse

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