BONAPARTE JOSEPH (1768-1844) roi de Naples (1806-1808) puis d'Espagne (1808-1813)
Boursier au collège d'Autun, avocat en Corse, candidat malheureux à la Constituante puis à la Législative, antipaoliste réfugié à Marseille (où il fait un mariage avantageux avec une fille du riche négociant Clary), Joseph apparaît déjà, avant l'irrésistible ascension de son frère, comme un garçon charmant, bien qu'un peu infatué, sur lequel on ne peut guère compter. « Aussi suffisant qu'insuffisant », dira plus tard de lui Talleyrand. Ensuite, à chaque étape de sa carrière, Napoléon hisse gentiment — trop gentiment ? — Joseph sur les marches de son propre piédestal. Joseph en est-il ravi ou humilié ? il faudrait dire plutôt qu'il trouve sa subordination choquante ; cet Ésaü n'avait aucun droit d'aînesse à vendre sur aucun héritage ; pourtant Joseph se comportera toujours comme si Napoléon le frustrait. Au temps du Consulat, il se pique de libéralisme, peut-être avec sincérité d'ailleurs, et encourage prudemment certains courants de fronde ; mais, élevé sur un trône puis sur un autre, il se prend pour un roi de droit divin avec une comique spontanéité, allant même jusqu'à menacer Napoléon, sur le ton d'une gravité impayable, de lui déclarer la guerre s'il n'obtempère pas à ses avis. Quand Napoléon le revoit en Espagne, à l'automne de 1808, et après plus de deux ans d'éloignement, il soupire : « Joseph est fou ! il est devenu tout à fait roi... » Du moins, aimable, bon vivant, friand de jolies femmes et fort peu altéré de sang, Joseph ferait un bon roi s'il ne se mêlait de vouloir enseigner la guerre aux maréchaux de son frère ; ses interventions sont aussi frivoles que sanglantes et désastreuses dans leurs résultats. En 1814, lieutenant général de l'Empire après avoir dû cesser de jouer au descendant des Rois Catholiques, il tente de galvaniser l'intérieur à sa bonne manière molle, brouillonne et catastrophique. Après Waterloo, il achève sa vie aux États-Unis sous le nom de comte de Survilliers ; il écrit alors beaucoup (aspiration velléitaire à être un homme de lettres qui se retrouve chez la plupart des Bonaparte), et notamment de belles lettres à Victor Hugo (qui les prendra fort au sérieux), où il explique que Napoléon était le démocrate le plus convaincu et le plus conséquent du monde.
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Écrit par
- Jean MASSIN : écrivain
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