CAMBON JOSEPH (1756-1820)
Originaire de Montpellier, issu d'une famille de négociants, de religion réformée, Cambon est élu à l'Assemblée législative par le département de l'Hérault. Il y révèle une connaissance des problèmes financiers qui attire l'attention sur lui. Ne demande-t-il pas un contrôle renforcé de la caisse de l'Extraordinaire et ne souligne-t-il pas les dangers de l'émission de trois cents millions d'assignats envisagée par l'Assemblée ? Ne dénonce-t-il pas les marchés frauduleux conclus entre généraux et fournisseurs ? Élu à la Convention, il continue ses dénonciations contre Servan, Dumouriez et d'Espagnac. Il joue un rôle de premier plan au Comité des finances (celles-ci échappent au Comité de salut public). Pour faire face à l'accroissement de la dette publique et au gonflement de la circulation des assignats, il cherche des solutions dans des mesures contre l'agiotage, un emprunt forcé d'un milliard (qui échoue), la suppression de la caisse d'escompte et la réforme de la comptabilité du Trésor. Mais son œuvre essentielle a été la création du Grand Livre de la Dette publique (24 août 1793) : la Convention reconnaissait les dettes de l'Ancien Régime et les fondait avec celles de la Révolution. Toutes les créances sur l'État sans distinction de date ou d'origine ont été inscrites sur le Grand Livre pour une somme correspondant à leur revenu annuel. Mesure habile : c'était, en faisant appel à leur intérêt, rallier les rentiers à la Révolution. « Vous verrez, disait Cambon, le capitaliste qui désire un roi parce qu'il a un roi pour débiteur et qui craint de perdre sa créance si son débiteur n'est pas rétabli désirera la république qui sera devenue sa débitrice, parce qu'il craindra de perdre son capital en la perdant. »
Des divergences opposent toutefois Cambon à Robespierre. Son intervention, le 8 thermidor, a donné le signal de la révolte contre l'Incorruptible : « Il est temps de dire la vérité tout entière : un seul homme paralyse la volonté de la Convention, cet homme, c'est Robespierre. » Cambon n'avait pas prévu qu'il serait victime de la réaction thermidorienne. Compromis dans l'insurrection du 1er avril 1795, il doit se cacher et vit retiré jusqu'en 1815 dans l'Hérault. Élu par ce département à la Chambre des Cent-Jours, il fait une brève rentrée politique. Proscrit sous la seconde Restauration comme régicide, il meurt en exil, près de Bruxelles.
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Écrit par
- Jean TULARD : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne
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