GARCIN DE TASSY JOSEPH HÉLIODORE SAGESSE VERTU (1794-1878)
Avec plusieurs autres orientalistes et indianistes français tels qu'Eugène Burnouf, Hyppolite Fauche ou, plus tard, Abel Bergaigne, Joseph Garcin de Tassy occupe une place qui n'a pas été encore vraiment reconnue, ces spécialités, largement dominées par les études anglaises, connaissant depuis longtemps en France une véritable défaveur. Né à Marseille, en pleine Terreur, il fit ses études au petit séminaire puis au lycée de cette ville, apprenant très rapidement les rudiments de l'arabe vulgaire. Il vint à Paris en 1817 pour y suivre des études de droit et fréquenta alors les cours de Sylvestre de Sacy au Collège de France et ceux de l'École des langues orientales. Bientôt distingué par ses professeurs, il apprend l'arabe littéraire, le turc, le persan, l'hindoustani et l'hindi. Étant originaire d'une ville naturellement tournée vers le monde musulman, il va devenir un des très bons connaisseurs de la culture musulmane de l'Inde, pays dans lequel il ne se rendra jamais, mais où il trouvera rapidement de nombreux correspondants qui vont lui faire parvenir textes et manuscrits. Cette pratique essentiellement « textuelle » de l'indianisme naissant est alors majoritaire, et il faudra attendre le xxe siècle pour que les études indiennes prennent en France véritablement appui sur une connaissance du « terrain ».
En 1821, Garcin de Tassy publie une traduction des Allégories morales de Mourad Deci et collabore ensuite au Recueil des historiens des croisades. En 1822, il donne au Cercle des beaux-arts une série de cours sur la littérature orientale. Il devient directeur de l'École des langues orientales, où l'on crée pour lui la chaire d'hindoustani. L'École possède aujourd'hui encore de nombreux manuscrits conservés et annotés par lui. Il supplée aussi au cours de persan de Sylvestre de Sacy. Élu en 1838 à l'Académie des inscriptions et belles-lettres au fauteuil de Talleyrand, il enseigna jusqu'en 1877 et a été président de la Société asiatique. Il possédait une très importante bibliothèque, qui fut dispersée à sa mort, mais dont une partie, demeurée non répertoriée, se trouve actuellement à la bibliothèque municipale de Marseille.
On doit à Garcin de Tassy d'innombrables traductions de textes arabes, perses et turcs, des Rudiments de la langue hindoustanie (1829) et des Rudiments de la langue hindouie (1847), deux volumes consacrés à La Rhétorique des nations musulmanes (1844-1848), un travail sur La Poésie philosophique et religieuse chez les Persans (1864), un important ouvrage sur La Langue et la littérature hindoustanies (9 vol., 1871-1878), pour ne citer que ses ouvrages majeurs. Ce travail prolixe et d'une rigueur scientifique parfois discutée a joué un rôle considérable dans l'éveil de la conscience intellectuelle française à l'égard de la civilisation indienne et musulmane, comme dans la constitution d'une école orientaliste proprement française.
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Écrit par
- Jean-Luc PINARD-LEGRY : journaliste
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