LAGRANGE JOSEPH LOUIS (1736-1813)
Au crépuscule du xviiie siècle, le mathématicien Lagrange a donné au calcul des variations sa formulation générale en l'abordant de manière purement analytique ; il appliquera ses méthodes à la mécanique dont il donne un exposé systématique qui repose sur la théorie des équations différentielles. Outre d'importants théorèmes de théorie des nombres, on lui doit un mémoire capital sur la théorie des équations qui annonce et prépare la grande révolution conceptuelle de l'algèbre au siècle suivant.
L'œuvre de Lagrange
Joseph Louis Lagrange appartenait à une famille turinoise originaire de France par les hommes. Les aptitudes scientifiques du jeune Lagrange se révélèrent très tôt et, bien que destiné au barreau, il se tourna à l'âge de dix-sept ans vers l'analyse mathématique.
La lecture de l'ouvrage d' Euler sur les isopérimètres le conduisit, dès 1754, à des résultats fondamentaux sur le calcul des variations, dont il doit être considéré, avec Euler, comme un des fondateurs. Il introduit la notion générale de variation et crée une méthode purement analytique, indépendante de considérations géométriques propres à chaque problème particulier. La réaction favorable d'Euler l'encourage et, en 1756, il applique ses techniques au principe de la moindre action, fondement de la mécanique.
En 1757, Lagrange et quelques-uns de ses amis fondent une société scientifique d'où sortira, en 1783, l'Académie de Turin. Dans les Mélanges de Turin édités par cette société, Lagrange publiera ses « Recherches sur la nature et la propagation du son » ; il participera brillamment à la célèbre polémique sur le problème des cordes vibrantes. Il développe ses conceptions sur le calcul des variations, les applique à la mécanique, et étudie de nombreux cas d'intégration d'équations différentielles et d'équations aux dérivées partielles.
Lagrange remporte le prix de l'Académie des sciences de Paris (1764, libration de la Lune et 1766, satellites de Jupiter).
Dans un court voyage à Paris, en 1764, il se lie d'amitié avec d'Alembert. Une riche et intéressante correspondance en résulte, qui durera jusqu'à la mort, en 1783, du mathématicien philosophe. Grâce à d'Alembert, il est appelé à Berlin, en 1766, par Frédéric II pour succéder à Euler qui rejoignait Pétersbourg. Son séjour en Prusse, qui dura jusqu'en 1787, fut fertile dans tous les domaines des mathématiques. Il continua ses recherches de mécanique céleste, remportant les prix de l'Académie de Paris en 1772 (problème des trois corps, où il obtint des résultats qui ne furent dépassés qu'en 1873), en 1774 (sur l'équation séculaire de la Lune) et en 1780 (sur les perturbations du mouvement des comètes). En mécanique pure, il traite analytiquement du mouvement de rotation d'un corps solide ; il utilise la même technique algébrique, qui se rattache à notre calcul matriciel, pour établir, en 1773, les propriétés géométriques du tétraèdre.
Cela nous conduit à une des contributions majeures de Lagrange, qui systématise, dans sa Mécanique analytique, l'ensemble des méthodes de statique et de dynamique qu'il avait utilisées antérieurement. L'ouvrage était déjà presque achevé en 1782, mais ne parut qu'en 1788, à Paris. Lagrange consacrera les dernières années de sa vie à une seconde édition revue et considérablement augmentée dont il ne verra que le premier volume paru en 1811, le second, posthume, étant de 1816. La mécanique de Lagrange, qui ramène l'étude de tout problème à la résolution d'équations différentielles, est aussi importante dans l'histoire du déterminisme scientifique que les travaux de mécanique céleste de Newton. Elle sera le point de départ de toutes les recherches ultérieures, tels les travaux d'Hamilton, qui la qualifiera avec lyrisme de « poème[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jean ITARD : agrégé de l'Université, membre correspondant de l'Académie internationale d'histoire des sciences
- Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
Classification
Média
Autres références
-
RÉFLEXIONS SUR LA RÉSOLUTION ALGÉBRIQUE DES ÉQUATIONS (J. L. Lagrange)
- Écrit par Bernard PIRE
- 195 mots
- 1 média
Joseph Louis Lagrange (1736-1813) publie en 1770 les Réflexions sur la résolution algébrique des équations dans les Mémoires de l'Académie royale des sciences et belles-lettres de Berlin, académie où il avait succédé à Leonhard Euler comme directeur des mathématiques. Ce texte...
-
ACTION & RÉACTION, physique
- Écrit par Jean-Marc LÉVY-LEBLOND
- 1 498 mots
...Théodicée de Leibniz, que la physique voit s'imposer une autre notion d'action. À l'origine de cette terminologie donc, la puissance divine. Plus laïquement, Joseph Louis Lagrange (1736-1813) montrera que la mécanique de Newton peut se déduire d'un « principe variationnel ». L'idée en est la... -
ANALYSE MATHÉMATIQUE
- Écrit par Jean DIEUDONNÉ
- 8 528 mots
...entièrement connu par la donnée d'un nombre fini de paramètres réels qj(1 ≤ j ≤ n) qui varient en fonction du temps t). La solution, due à Lagrange, consiste à chercher les « oscillations propres » (ou « en phase »), c'est-à-dire de la forme qj(t) = cjϕ(t), où cj est une constante,... -
BESSEL FRIEDRICH (1784-1846)
- Écrit par Bernard PIRE
- 496 mots
En 1817, Bessel introduit les fonctions qui porteront son nom et qui s’avéreront indispensables à la description de la propagation des ondes.
Né le 22 juillet 1784 à Minden en Westphalie, fils d’un petit fonctionnaire, Friedrich Wilhelm Bessel accomplit un début de scolarité si médiocre au lycée...
-
CALCUL INFINITÉSIMAL - Histoire
- Écrit par René TATON
- 11 465 mots
- 3 médias
Quant à Lagrange, estimant la méthode des limites entachée d'un recours à la métaphysique et suspectant la rigueur de la méthode des infiniment petits, il s'efforça, dès 1772, de fonder l'analyse sur des méthodes algébriques et en particulier sur l'emploi des développements en séries de Taylor.... - Afficher les 17 références