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PAXTON JOSEPH (1803-1865)

Le xixe siècle a donné naissance à un type de manifestation spectaculaire qui contribue à symboliser ses structures socio-économiques fondamentales : les expositions universelles. Elles scandent les transformations vers lesquelles le siècle est orienté. Elles situent les étapes progressives de l'industrialisation. Elles prétendent exhiber les conquêtes du machinisme. La présentation des produits exige des locaux appropriés, théoriquement provisoires. Surgissent dès lors de nouveaux problèmes d'ordre architectural. La réponse à ces nouveaux programmes va susciter des solutions expérimentales : malgré leur caractère provisoire, les constructions qui seront ainsi réalisées seront des œuvres d'avant-garde et tendront à exprimer l'extrême pointe des possibilités techniques du moment. Dans l'histoire de l'architecture, les expositions universelles peuvent donc être considérées comme des jalons importants.

Il était normal que la formule de l'exposition universelle prenne corps en Angleterre, c'est-à-dire dans le pays industriellement le plus avancé. Elle se déploya à Londres, à Hyde Park, en 1851, dura cent quarante et un jours et accueillit 6 039 195 visiteurs. Elle fut le prétexte du célèbre Crystal Palace, construit par Paxton (il servit à construire en 1852-1854 le Crystal Palace de Sydenham détruit par un incendie en 1936). L'origine de ce bâtiment révolutionnaire, il faut la trouver, certes, dans le génie inventif de Paxton, mais aussi dans un singulier, rare, étonnant contexte : en 1826, William Spencer, sixième duc de Devonshire, offre à un jeune jardinier attaché à la Société d'horticulture de Chiswick la fonction de chef jardinier du domaine de Chatsworth. Joseph Paxton déploie aussitôt une activité inattendue, variée, multiple : il s'attache à apprendre les langues, réunit une collection de conifères, construit des serres pour protéger les orchidées, remanie le dessin des jardins, crée des pièces d'eau. En 1837, il entreprend la construction d'une serre géante en vue de reconstituer les conditions climatiques favorables au maintien d'essences végétales (palmiers-dattiers, bananiers, etc.) et d'oiseaux tropicaux : ainsi fut édifié the largest glass building in the world (84 m de longueur, 38 m de largeur, 20 m de hauteur) sous une couverture incurvée montée sur un léger châssis en bois façonné dans des lamelles encollées et à partir de montants de fonte creux spécialement dessinés pour ce projet. Nul ne pouvait alors se douter que cet ouvrage n'était qu'une introduction, la préface d'une démarche plus hardie, plus complète, plus ambitieuse encore : celle qui, en 1851, allait, pour réaliser le Crystal Palace, reposer sur l'utilisation à grande échelle d'éléments usinés préfabriqués en fer, verre et bois, sur la construction en série et la standardisation des matériaux, sur l'industrialisation du bâtiment, la mécanisation du chantier, ce dernier supposant des procédés de montage inédits. Malgré la campagne menée par les architectes professionnels, les ingénieurs, les techniciens contre un « amateur », malgré les « avertissements » de ces « spécialistes » (fondations insuffisantes, vibrations inquiétantes, dangers d'effondrement, impossibilité d'achever une telle entreprise en temps utile, etc.), les différents éléments en bois et en fer (usinés par plusieurs firmes de Birmingham) furent livrés selon le programme établi, assemblés sur place et montés en moins de six mois, les pièces les plus lourdes, les poutres de fonte (24 pieds de longueur : module de base) ne dépassant pas le poids d'une tonne. Cet immense bâtiment transparent (deux ailes rectangulaires reliées à un corps central : transept perpendiculaire couvert en berceau) couvrait 70 000 mètres carrés. Il peut être techniquement décrit comme une vaste verrière reposant sur une ossature métallique (colonnes de fonte)[...]

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Écrit par

  • : directeur de l'École nationale supérieure d'architecture et des arts visuels, Bruxelles

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Transept de Crystal Palace - crédits :  Bridgeman Images

Transept de Crystal Palace

Autres références

  • CRYSTAL PALACE, Londres

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    • 217 mots
    • 1 média

    En 1850-1851, Joseph Paxton construit à Londres le Crystal Palace pour l'Exposition universelle de 1851. C'est l'un des bâtiments symboliques de l'architecture du xixe siècle, par la nouveauté des matériaux utilisés, le verre et le fer, l'originalité de sa forme, inspirée...

  • ANGLAIS (ART ET CULTURE) - Architecture

    • Écrit par
    • 7 827 mots
    • 30 médias
    ...créer une architecture planifiée d'un modèle jusqu'alors inconnu. La démonstration absolue de ces formes potentielles devait être faite en 1851 par J. Paxton. Celui-ci dirigea à l'occasion de la première Exposition universelle la construction du Crystal Palace, vaste vaisseau transparent de plus...
  • ARCHITECTURE (Matériaux et techniques) - Acier

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    • 3 257 mots
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    ...éléments comprimés, et l'acier, pour les éléments soumis à la traction. Ainsi fut érigé en 1851, à l'occasion de l'Exposition universelle de Londres, l'édifice de Joseph Paxton connu sous le nom de Crystal Palace : une toiture vitrée en plein cintre dans une ossature réticulée en acier et en fonte.
  • ARCHITECTURE (Matériaux et techniques) - Bois

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    • 22 médias
    ...l'Exposition universelle de Londres en 1851 (17 000 m2 de bois pour 70 000 m2 au sol), alliance des possibilités techniques du bois, du métal et du verre, Joseph Paxton ouvre de nouvelles perspectives au bois. L'emploi conjoint du bois et du métal, puis l'intervention de la colle dans l'élaboration de matériaux...
  • ARCHITECTURE (Matériaux et techniques) - Fer et fonte

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    ...n'est donc pas un hasard si le premier pavillon d'une exposition universelle est dû à un jardinier. Le Crystal Palace, à Londres, monté en six mois par Joseph Paxton, en 1851, n'était qu'une immense serre préfabriquée ; bel exemple de coordination, puisque ses éléments venaient de plusieurs usines....
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