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JOSQUIN DES PRÉS (1440 env.-env. 1521)

L'homme et le style

La réputation de Josquin, de son vivant, était supérieure à celle des autres musiciens. Ronsard, dans sa préface au recueil Mélange de chansons, publié en 1560 (réédité en 1572), cite parmi les disciples de Josquin : Mouton, Willaert, Richafort, Janequin, Maillard, Claudin (de Sermisy), Moulu, Jaquet, Certon et Arcadelt. Le mot disciple est ambigu. Mais si tous les musiciens cités par Ronsard n'ont pas été directement élèves de Josquin, ils lui sont tous redevables de leur technique.

On cite souvent le mot de Martin Luther : « Les musiciens font ce qu'ils peuvent des notes, Josquin en fait ce qu'il veut. » L'éditeur anversois Tylman Susato l'affirme « en son temps très excellent et superéminent en sçavoir musical ».

L'Italien Cosimo Bartoli écrit en 1567 : « De Josquin, on peut dire qu'il fut, en musique, un monstre de la nature comme le fut en architecture, en peinture, en sculpture, notre Michelangelo Buonarroti. » En 1576, l'édition des Mélanges de Roland de Lassus porte un sonnet de J. Megnier dont nous extrayons ce vers : « Josquin aura la palme ayant été premier. »

Du style et de la technique de ses prédécesseurs – Dufay, Busnois, Ockeghem, Obrecht – Josquin a hérité une parfaite connaissance de toutes les subtilités du contrepoint, et même prolonge-t-il, en les modifiant à sa guise, certains principes issus de l'Ars nova du xive siècle (l'isorythmie, par exemple). Mais lors même qu'il recourt aux artifices d'écriture les plus complexes (augmentations, diminutions, récurrences, canons à l'écrevisse), il le fait avec une telle aisance qu'on oublie la technique : la polyphonie est aérée, lumineuse, élégante, et donne une singulière impression d'équilibre et de facilité.

Une autre originalité de Josquin est son art de faire valoir le sens figuratif ou affectif d'un mot dans le texte. Prend-il un texte aussi ingrat à mettre en musique que le récit évangélique de la généalogie du Christ (Liber generationis Jesu Christi) il le vivifie par ses raffinements d'écriture ou la façon dont il jongle avec les syllabes des noms propres (tel Zorobabel). Mais ce n'est pas seulement un jeu ; souvent, il perpétue ou renforce une sorte de tradition du symbolisme sonore dont le musicologue F. Feldmann a étudié les divers aspects, distinguant notamment la catabasis, les redictae et les faux-bourdons. La catabasis peut figurer musicalement une descente, un instant de recueillement (s'accompagnant d'une inclination de tête de l'officiant durant la messe), voire s'associer à l'idée de la mort. Les redictae sont des notes isolées ou des formules mélodiques de trois notes qui se répètent avec plus ou moins d'insistance. Le théoricien du xve siècle, Johannes Tinctoris, y voyait une imitatio tubarum et campanarum. Mais la signification des redictae n'était pas limitée à l'imitation des trompettes ou des cloches. Quant aux faux-bourdons (écriture à trois voix en accords de sixtes parallèles), ils sont généralement associés au symbolisme du nombre 3 (le mystère de la Sainte-Trinité par exemple).

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Josquin des Prés - crédits : Universal History Archive/ Getty Images

Josquin des Prés

Adieu mes amours, Josquin Des Prés - crédits : AKG-images

Adieu mes amours, Josquin Des Prés

Autres références

  • MESSE PANGE LINGUA (Josquin des Prés)

    • Écrit par
    • 244 mots
    • 1 média

    C'est dans ses œuvres religieuses, et plus particulièrement dans ses messes, que Josquin des Prés donne la pleine mesure de son génie : les dix-huit messes complètes qui lui sont attribuées avec certitude mettent en évidence l'apport considérable du plus illustre représentant de l'école...

  • CONTREPOINT

    • Écrit par
    • 4 643 mots
    ...enchevêtrées se neutralisent les unes les autres et que très rapidement l'auditeur ne peut plus rien saisir de façon précise. Vers la souplesse et la transparence va un Josquin des Prés, le grand maître de ce temps. Sa liberté, son élégance, sa fluidité d'écriture ne seront jamais égalées.
  • MÉLODIE

    • Écrit par
    • 4 137 mots
    • 1 média
    ...deux axes, l'un horizontal, l'autre vertical, d'où va naître un nouvel élément constitutif du discours : l'harmonie. Dans la pré-Renaissance, chez un Josquin Des Prés, on peut considérer que l'affirmation de cet élément est un fait accompli. Mais si les rencontres harmoniques entre les parties ont déjà...