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JOUMBLATT ou DJOUMBLATT KAMAL (1917-1977)

Kamal Joumblatt est mort assassiné à l'âge de soixante ans, le 16 mars 1977, au cœur de cette montagne libanaise dont il était un pur produit.

La gauche, dont ce chef féodal était l'incontestable figure de proue, s'est trouvée décapitée au moment où, après la guerre intérieure de 1975-1976, elle se voyait déjà dans une bien difficile posture. Le mystère qui a entouré son assassinat a ajouté une touche à l'image énigmatique de ce personnage aux contours insaisissables.

Rebelle druze, 1958 - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Rebelle druze, 1958

Au sein de la communauté druze, dont il était devenu au fil des ans le symbole, alors qu'il n'était à l'origine que le chef d'un des clans qui la composent, ce fut, toutes proportions gardées, le même sentiment qu'en Égypte à la mort de Nasser : la brusque disparition du père. Ses partisans appelaient d'ailleurs Joumblatt, avec un mélange d'affection et de déférence, « al-Moallem » : le sage et le maître.

Affrontements au Liban, automne de 1975 - crédits : Claude Salhani/ Sygma/ Getty Images

Affrontements au Liban, automne de 1975

Ce « prince rouge », ainsi qu'on l'a parfois abusivement surnommé, car il n'était pas marxiste, a été un des animateurs de la guerre du Liban de 1975-1976, dont il fut la dernière victime, quatre mois après la cessation des combats. Ce fut son ultime lutte. Au cours de sa carrière politique, qui débuta en 1943 lorsqu'il devint député à l'âge de vingt-six ans, il avait participé, sur des thèmes de politique intérieure, au renversement du président de la République Béchara el-Khoury (1952) ; sur des thèmes de politique arabe, à l'élimination du président Camille Chamoun (1958) et, au côté de la résistance palestinienne, à toutes les épreuves de force engagées par celle-ci avec l'État libanais, notamment en 1973, sous le mandat du président Soleiman Frangié et, de nouveau, au cours de la guerre de 1975- 1976.

En épousant le panarabisme à l'époque nassérienne, puis la cause palestinienne après la défaite arabe de juin 1967, Joumblatt a-t-il trahi le nationalisme libanais auquel les Druzes, en habitants de la montagne, sont ataviquement presque aussi attachés que les maronites ? Ses adversaires l'en accusaient. Il a toujours soutenu qu'il n'y avait nulle incompatibilité entre l'un et l'autre et que le nationalisme libanais plongeait ses racines dans l'arabité.

Aussi, lorsque, à la suite d'un premier renversement d'alliances, les progressistes, dont il était le chef, et leurs alliés palestiniens se sont farouchement opposés, en 1976, à l'intervention syrienne au Liban, Kamal Joumblatt a-t-il retrouvé spontanément les accents du Libanais de vieille souche qu'il n'a jamais cessé d'être pour dénoncer l'invasion de « sa » montagne.

Pénétré d'humanisme et de culture occidentale, particulièrement française, proche de la pensée de Teilhard de Chardin, imbu de philosophie hindoue qu'il allait chaque année recueillir à la source dans les ashrams de l'Inde, doté d'une vaste culture politique progressiste, Kamal Joumblatt tranchait sur le personnel de la vie publique libanaise, dont la culture se réduit le plus souvent à des connaissances utilitaires.

Son fils Walid lui a succédé tout naturellement comme principal chef druze en même temps qu'à la tête du Parti socialiste progressiste et du Mouvement national, qui regroupe la gauche libanaise et ses alliés musulmans.

Cette succession, qui a paru aller de soi, constituait, post-mortem, une ultime manifestation de l'ambivalence de Kamal Joumblatt : progressiste certes, mais aussi aristocrate détenteur d'une légitimité sui generis.

— Lucien GEORGE

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Écrit par

  • : directeur des Fiches du monde arabe, correspondant pour le Moyen-Orient des journaux Le Monde, Le Nouvel Observateur, Le Soir, La République

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Médias

Rebelle druze, 1958 - crédits : Central Press/ Hulton Archive/ Getty Images

Rebelle druze, 1958

Affrontements au Liban, automne de 1975 - crédits : Claude Salhani/ Sygma/ Getty Images

Affrontements au Liban, automne de 1975

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  • LIBAN

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    ...l'imām Sadr, Amal, créée en 1975, jouissent d'une liberté proche de l'anarchie, sous la protection – et à la merci – de milices locales. L'assassinat de son chef charismatique, Kamal Joumblatt, le 16 mars 1977 à proximité d'un barrage syrien a en effet privé le Mouvement national d'unité...