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JUNI JUAN DE (1506 env.-1571)

Avec Alonso Berruguete et Gregorio Fernández, Juan de Juni domine l'école de sculpture polychrome de Valladolid. Il ne s'établit cependant dans cette ville qu'assez tard, en 1541, après avoir travaillé dans diverses cités espagnoles.

D'origine française et très influencé par l'Italie, il possédait une large culture dont témoignent les ouvrages français, italiens, latins et espagnols — parfois illustrés de gravures flamandes — de sa bibliothèque. Dans son atelier se trouvaient non seulement des Espagnols, mais aussi des Flamands et des Italiens.

Juni pratiqua d'abord à León (à partir de 1533) l'art de la première Renaissance, dans une série de médaillons ornés de bustes, pour la façade du couvent de San Marcos. À Medina de Rioseco, il exécuta en terre cuite — une matière dont le goût lui venait d'Italie et qu'il abandonna en 1540 — les groupes de Saint Jérôme pénitent et du Martyre de saint Sébastien (1538), placés de part et d'autre du maître-autel de l'église de San Francisco. Toujours dans cette ville, mais dans l'église de Santa María, on trouvera l'un de ses plus beaux retables, celui de l'extraordinaire chapelle des Benavente, couverte des stucs de Jerónimo Corral. L'Immaculée Conception et la Rencontre de sainte Anne et de saint Joachim, les plus beaux morceaux du retable, annoncent déjà l'art d'un Juan Martínez Montañés. Ils datent des années cinquante.

Cette nouvelle manière, en quelque sorte pré-baroque, avait débuté à Valladolid par la Mise au tombeau (1541-1544, musée de Valladolid), provenant du couvent de San Francisco. L'œuvre, théâtrale et grandiloquente, est vivement peinturlurée, dans le goût des pasos. Une heureuse évolution conduisit rapidement l'artiste de cette frénésie délirante à un pathétique plus authentique. On peut la suivre à travers l'étonnant Buste reliquaire de sainte Anne, également au musée de Valladolid, la poignante Vierge aux sept glaives (Virgen de los cuchillos) de l'église de Las Angustias de la même ville (1560) ou encore la dramatique Mise au tombeau de la cathédrale de Ségovie (1571).

Tout en demeurant attaché à l'expression pathétique du sentiment religieux, Juan de Juni la tempéra par une plus exacte observation du réel. Il devait ainsi parvenir à une plénitude qu'illustre, tout à la fin de sa vie, la belle statue en marbre représentant à San Segundo de Ávila le patron de cette église (1571-1573).

— Marcel DURLIAT

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire de l'art à l'université de Toulouse-Le-Mirail

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