NIEREMBERG JUAN EUSEBIO (1595-1658)
Jésuite espagnol, Juan Eusebio Nieremberg naquit à Madrid de parents allemands. Il fit ses études chez les jésuites ; à l'université d'Alcalá, puis à celle de Salamanque il reçut une solide formation d'humaniste et de théologien. Il fit profession dans la Compagnie de Jésus en 1616. La direction spirituelle et l'enseignement furent le plus clair de son activité : il ne put faire aboutir son désir d'être missionnaire aux Indes occidentales. Son œuvre, très abondante, est plus appliquée à l'ascèse qu'orientée vers le mysticisme : lui-même était renommé pour la rigueur extrême de ses mortifications. Ses œuvres spirituelles connurent un immense succès, qui s'étendit hors de l'Espagne. Elles traitent des questions les plus variées : de l'histoire naturelle à la philosophie, du pouvoir politique à l'hagiographie. Une curiosité universelle inspire ces écrits qui ont tous pour objet d'entraîner le lecteur à la perfection chrétienne tout en exaltant l'« amabilité » de Dieu : Causa y remedio de los males públicos, Corona virtuosa y virtud coronada, De la hermosura de Dios y su amabilidad, Vida divina y camino real, Aprecio y estima de la divina gracia. On retiendra surtout un grand traité d'ascétisme : Diferencia entre lo temporal y lo eterno, crisól de desengaños (1643) ; ce « creuset du désabusement » oppose, sur le mode baroque, l'éternelle et immuable Vérité au monde naturel qui n'en est que le chemin parsemé d'illusions et digne de mépris. Ce contemptus mundi ne réfrène cependant pas l'ardeur d'écrire de cet auteur prolixe et doué. Sa biographie de saint François Borgia (1644) est considérée comme un modèle du genre, surpassant celle qu'il écrivit de saint Ignace de Loyola (1645). Nieremberg est un écrivain de premier plan, élégant et précis, à l'écart de la préciosité et du conceptisme qui faisaient fureur en son temps. Sa version en espagnol de L'Imitation du Christ a connu un succès qui ne s'est pas démenti jusqu'à aujourd'hui. Ses Lettres, souvent de pure fiction, sont une mine de renseignements sur les mœurs et les systèmes de pensée dans l'Espagne de Philippe III et de Philippe IV.
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Bernard SESÉ : professeur émérite des Universités, membre correspondant de la Real Academia Española
Classification