SEPÚLVEDA JUAN GINÉS DE (1490 env.-1573)
Humaniste espagnol, né dans la province de Cordoue vers 1490. Après des études à Bologne, Sepúlveda vit, de 1523 à 1529, à la cour pontificale comme traducteur d'Aristote, puis devient, en 1529, historiographe de Charles Quint ; celui-ci le nomme, en 1536, précepteur du futur Philippe II. Il a laissé en latin une histoire de la découverte du Nouveau Monde, celle de Charles Quint et celle des premières années du règne de Philippe II. Mais autant qu'à ses qualités d'historien, sa notoriété tient à la virulence de son racisme à l'encontre des Indiens. Celle-ci transparaît dans les deux dialogues Democrates primus et Democrates alter, qu'il écrivit pour contredire les théories humanitaires de Bartolomé de Las Casas. Dans le Democrates secundus sive Dialogus de justis causis belli, il exalte la constitution d'un impérialisme mondial d'une façon telle qu'il suscite la réprobation des théologiens de Salamanque et d'Alcalá consultés par le Conseil de Castille. L'écrit est publié en Espagne et provoque une violente controverse. Pour éclairer le Conseil des Indes, une junte de théologiens et de juristes se réunit en 1550 : Sepúlveda se heurte alors à l'anticolonialisme de Las Casas ; Francisco de Vitoria apporte une solution et, au nom des principes du christianisme et du respect de la souveraineté politique, affirme que, sous réserve de conditions très définies, la colonisation peut être juste ; touchant l'autre idée majeure prônée par Sepúlveda, il affirme qu'il y a lieu de rejeter l'idée parfaitement dépassée d'un empire universel et d'instaurer un réel équilibre entre des nations souveraines. Comparant, dans sa Leçon sur les Indiens (Relectio de Indis), les Indiens aux paysans des régions retirées d'Europe (les uns et les autres doivent également être éduqués), Vitoria avait déjà affirmé le droit des nations indigènes à exercer leur souveraineté puisque ceux-ci avaient, dès avant l'arrivée des Espagnols, une organisation sociale propre et fort élaborée. Malgré les réfutations des uns et les nuances apportées par d'autres, la conception de la colonisation défendue par Sepúlveda devait avoir un retentissement certain en Espagne, cela d'autant que le livre avait été publié en langue vulgaire.
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Écrit par
- François BURDEAU : professeur à la faculté des sciences juridiques de Rennes
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