FOLKMAN JUDAH (1933-2008)
Médecin et chirurgien américain, considéré comme le père fondateur des travaux portant sur l'angiogenèse tumorale, c'est-à-dire la capacité des tumeurs de pourvoir à leur approvisionnement en oxygène et en nutriments par la formation de nouveaux vaisseaux sanguins qui les irriguent. Les découvertes de Judah Folkman ont bouleversé notre compréhension de la biologie du cancer – ouvrant la voie à de nouveaux traitements (thérapie anti-angiogénique) – ainsi que, plus largement, celle de la biologie du système vasculaire et de sa formation.
Né le 24 février 1933 à Cleveland (Ohio), Judah Folkman décide dès son enfance de se vouer à la médecine après avoir accompagné son père, un rabbin, dans les hôpitaux du Middle West pour rendre visite aux patients et leur apporter quelque réconfort. Il obtient ses diplômes à l'université d'État de l'Ohio en 1953 et à l'université Harvard en 1957 puis se spécialise en chirurgie cardio-vasculaire où, encore étudiant, il se fait remarquer en concevant l'un des tout premiers pacemakers implantables. Mais c'est au début des années 1960, alors qu'il accomplit son service militaire dans un laboratoire de la marine nationale américaine à Bethesda (Maryland), qu'il va se montrer tel que son père le lui avait demandé d'être, un « médecin-rabbin ». C'est là qu'il conçoit un polymère de silicone implantable, permettant la libération contrôlée, lente et régulière, de médicaments, système qu'il ne brevette pas et dont il va faire don, une fois adapté à la libération d'un contraceptif (le Norplant), au Population Council.
C'est aussi au cours de ces années que, observant l'incapacité des tumeurs de croître in vitro au-delà d'une très petite taille, il émet l'hypothèse que celles-ci nécessitent un réseau vasculaire local en leur sein pour se procurer l'oxygène et les nutriments nécessaires à leur croissance, et qu'elles sont capables elles-mêmes d'induire la formation de néo-vaisseaux pour croître et envahir d'autres tissus. Son laboratoire isole, en 1971, la première protéine pro-angiogénique produite par une tumeur, le TAF – tumor angiogenesis factor – puis découvre les premiers inhibiteurs de l'angiogenèse (Langer et al., « Isolations of a cartilage factor that inhibits tumor neovascularization », in Science, vol. 193, pp. 70-72, 1976). Au cours de cette même année, il publie le résultat de ses travaux dans le New England Journal of Medicine (« Tumor angiogenesis : therapeutic implications », vol. 285, pp. 1182-1186, 1971) suscitant, pendant plus d'une décennie, un scepticisme général, voire une opposition sans concession. Cependant, au début des années 1980, Folkman sera considéré comme l'initiateur de la recherche sur l'angiogenèse et son implication dans l'établissement et le développement des tumeurs. Son hypothèse, si controversée auparavant, va permettre l'émergence de nouvelles molécules thérapeutiques qui se trouveront utilisées, au fil des années, non seulement dans le champ de l'oncologie, mais aussi dans d'autres pathologies comme la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA). En 2004, un anticorps monoclonal dirigé contre le facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (VEGF, vascular endothelial growth factor) – protéine produite notamment par la tumeur pour assurer sa vascularisation à partir des vaisseaux sanguins existants – permet pour la première fois, après un grand nombre d'essais infructueux avec de nombreuses autres molécules, d'obtenir des réponses significatives en termes de survie chez des patients présentant des tumeurs du colon au stade terminal.
Auréolé de nombreux prix, Judah Folkman a créé une grande école de pensée et ses nombreux étudiants et post-doctorants[...]
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Écrit par
- Jean-Luc TEILLAUD : directeur de recherche à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale
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