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JUDAÏSME La religion juive

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La mystique théosophique et la kabbale

Le mouvement mystique (ou plus exactement théosophique) qui apparut dans le judaïsme en plein xiie siècle ne saurait être réduit à une simple réaction contre l'intellectualisme. On est en réalité en face d'une résurgence d'éléments dont le dynamisme réel n'avait pu se déployer, en des domaines et des milieux juifs que les historiens connaissent encore mal. À partir du xiie siècle se manifestèrent au grand jour des courants que l'on pouvait observer déjà dès la période talmudique : expériences de mystique extatique et spéculations cosmologiques, mises au service de la théosophie. Le midi de la France, puis la Catalogne et l'Espagne furent le terrain de ces manifestations. On voit surgir des idées gnostiques ; on découvre dans la divinité de multiples aspects dynamiques dont l'interaction complexe est traduite par une exégèse symbolique qui s'approprie l'Écriture, la tradition, les actes concrets de la vie religieuse et le vocabulaire sinon les notions de la philosophie. On pousse jusqu'à ses plus extrêmes conséquences l'idée, ancienne, de la sympathie universelle. Il y a action du divin sur l'humain et réciproquement. C'est ainsi qu'aux malheurs de l'histoire d'Israël dont la cause est le péché correspondent des bouleversements dans la vie divine. L'obéissance du peuple élu commande l'harmonie universelle, dont la rédemption de l'humanité, de la nature et de la déité. D'où, l'importance souveraine de la Loi et de son application minutieuse à tous les détails de la vie. Le mal est redécouvert avec les moyens de le vaincre. La philosophie et son intellectualisme se trouvent dès lors dépassés par ces orientations. Et dans les perspectives d'une telle rédemption universelle, le drame de la coexistence d'Israël avec les nations prend tout son sens. Tel est, pour l'essentiel, l'apport de la kabbale(« tradition » : le nouvel ésotérisme se réclame d'une tradition aussi antique, sinon plus, que la Loi révélée) à l'idéologie juive. Diverses circonstances consolidèrent sa position. Des tendances ascétiques parallèles à celles de l'ésotérisme languedocien – dont les similitudes avec le catharisme ne doivent pas être perdues de vue – furent renforcées en pays allemand par le «   hassidisme », mouvement piétiste alimenté par les mêmes sources que la kabbale et influencé de façon paradoxale par le christianisme qu'il abhorrait. Le statut des juifs dans une partie de l'Occident chrétien s'étant largement détérioré, l'attente messianique s'exaspéra et, bien plus que celle-ci, la conviction que le mal s'incarnait dans le monde des non-juifs, chrétiens et musulmans, devint particulièrement aiguë. Le sommet de cette crise fut l'expulsion des juifs d'Espagne, en 1492. Dès lors, le mysticisme s'intensifia ; il prit une allure gnostique accentuée dans l'expression qu'en donna Isaac Louria (mort à Safed en 1572). La tâche du juif appelé à recueillir les étincelles de lumière englouties dans les ténèbres du mal est désormais de « réparer » la brisure, précosmique dans la divinité, cosmique dans les contrastes de l'univers visible, historique dans l'exil d'Israël, individuelle dans l'âme du pécheur. Deux voies s'ouvrent pour cette réparation : la voie ordinaire, qui consiste dans l'observance stricte de la Loi (dont la codification, qui fait encore autorité de nos jours, est l'œuvre d'un collègue d'Isaac Louria) ; la voie extraordinaire, par laquelle le juste descend dans l'abîme du mal afin d'y abolir le péché en le commettant en apparence. Il s'agit là de la conséquence extrême : elle trouve sa réalisation dans le mouvement messianique de Sabbatai Zevi (1626-1676) ou « sabbataïsme ». L'échec de ce dernier est à l'origine[...]

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Écrit par

  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section)

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Maimonide - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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