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JUDAÏSME Le judaïsme contemporain

Le courant orthodoxe

Pour les orthodoxes, la règle de vie doit être la volonté révélée par Dieu au Sinaï et non la législation en vigueur à telle ou telle époque particulière : la pratique juive n'est pas affaire d'interprétation et de consensus, et il faut se référer à la halakha (orthodoxe) comme à la norme divine. Cependant, la conviction qu'a l'orthodoxie moderne de pouvoir refaire sur cette base l'unité de la communauté est battue en brèche par deux faits. D'une part, pour se poser comme tel, le courant orthodoxe a dû se séparer et, lors de l'Austrittsbewegung (mouvement de scission) de 1874, créer ses propres communautés distinctes. D'autre part, il se révèle lui-même moins unifié qu'il ne le prétend : il a en son sein au moins deux tendances, l'une qui a opté pour l'éducation séculière et qui accepte, en fait, de coopérer avec les libéraux parce qu'elle partage les mêmes valeurs et obéit aux mêmes idéaux, l'autre pour qui la seule référence demeure la Tōrah avec ses adages, ses méthodes de lecture et ses seules orientations séculaires.

Mais la mentalité de l'orthodoxe moderne diffère profondément de celle du juif d'autrefois : pour le premier, en effet, être juif n'est pas une évidence, mais une haute conscience. Il ne reçoit pas de la naissance seulement son appartenance au judaïsme ; comme le juif de la réforme, il la choisit. Il doit apporter des réponses aux questions nées des temps actuels et, pour ce faire, il doit les justifier en recourant aux textes. Sans l'admettre, et même sans bien s'en rendre compte, le judaïsme orthodoxe a modifié l'idée ancienne de la Tōrah, en la considérant comme une affaire de religion et en la situant en dehors de la politique de l'État, alors même qu'il lui assigne son lieu dans la vie quotidienne. On peut ainsi aisément être « bon juif à la maison et bon citoyen dans la nation », mais on se trouve alors menacé de dichotomie. C'est pourquoi le judaïsme orthodoxe va s'employer sans cesse à rappeler au juif moderne ses « devoirs religieux » ; il met la priorité sur l'éducation et S. R. Hirsch dut s'attacher à défendre des points devenus soudain incertains : la nécessité du port des tefilin (phylactères), le sens de l'attente du retour du culte sacrificiel et la signification du troisième Temple. Ces articles, qui sont en principe la pierre angulaire de l'orthodoxie, sont loin, en effet, d'être clairs dans l'esprit de celle-ci et même loin d'y jouer un rôle central. L'orthodoxie affirme la venue du messie personnel et la reconstitution, lors de celle-ci, de la nation juive dans son unité sur la terre d'Israël. Mais, en se concevant préalablement et essentiellement comme jetée dans la vie du monde, elle renvoie dans un avenir lointain cet événement espéré ; elle fait de la vie présente un intérim, et c'est justement ce que les sionistes conséquents ont contesté. Les orthodoxes qui se sont rassemblés dans l'Agouda en 1910 considèrent que le retour actuel des juifs en Terre sainte peut être considéré comme un acte de sanctification, mais non comme un signe messianique, tandis que l'autre tendance, issue de Rav Kook, le parti Mizrahi, constitué en 1901, y voit une anticipation réelle de la rédemption (exprimée dans la célébration liturgique du jour de l'indépendance d'Israël).

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Écrit par

  • : directeur du Centre d'études Istina et de la revue Istina

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