JUDAÏSME Les pratiques
Le temps sacré et les rites
Encore qu'une excommunication pût sanctionner un « comput des années embolismiques et une détermination des mois hors de la Terre sainte » (cf. Maïmonide, Le Livre de la connaissance), la sainteté du temps l'emporte, dans la religion juive, sur celle du lieu. Cadre a priori de l'expérience religieuse selon la notion de qedušat ha-zman, le temps acquiert un caractère de sainteté indépendamment du territoire.
Les différents computs
La journée commençait avec le sacrifice du matin ; en son milieu était offert un second sacrifice : les prières dites šaḥarit et minḥa les remplacent à heures fixes depuis la destruction du Temple. Suivant les sept jours de la Création, la semaine s'achève avec le šabbat, séparé des jours profanes par l'allumage de bougies et consacré par le Qidduš, sanctification sur le vin. Le šabbat est totalement à part dans la semaine et dans l'année ; on ne s'y livre à aucune activité créatrice et sa transgression entraîne la peine de seqilah (lapidation). Arraché à la vie ordinaire, ce jour doit constituer un avant-goût du monde paradisiaque (me'en 'olam ha-ba). Dite habdala, « séparation », la clôture du šabbat n'est effective qu'avec la bénédiction qui s'exprime dans la formule : « Béni sois-tu, Seigneur, toi qui distingues le sacré du profane. »
Le rythme des fêtes dépend d'un calendrier lunaire rapporté au cycle solaire par l'adjonction d'un mois supplémentaire les 3e, 6e, 8e, 11e, 14e, 17e et 19e années d'un cycle de dix-neuf ans, de manière que Pesaḥ tombe toujours au printemps. Les fêtes surviennent à des dates fixes du calendrier lunaire, ce qui entraîne leur mobilité sur le calendrier civil : Pesaḥ, le 15 nissan ; Šabu'ot, le 6 sivan ; Sukkot, le 15 tišri. Le mois commence par une demi-fête, une néoménie, Roš Ḥodeš. Un jour occupe un rang exceptionnel, Yom Kippur, le Grand Pardon, qui se célèbre le 10 tišri (Lévitique, xvi, 30 ; xxiii, 26-32). Depuis Philon, il réunit à la synagogue un nombre considérable de juifs, même détachés de toute pratique. Pour le judaïsme vécu, ce jour l'emporte en importance sur tous les autres.
Le comput des années reposait originairement sur les préceptes instituant une année sabbatique tous les sept ans (Lév., xxv, 3) et une année jubilaire au terme de quarante-neuf ans (Lév., xxv, 8). Dans l'ancien Israël, on chiffrait les années d'après celles du règne des rois. D'autres computs furent adoptés par la suite : on eut ainsi l'ère des Séleucides ou des Contrats (à partir de – 312) et l'ère de la Création du monde (Anno Mundi) qu'on fait commencer en – 3761 et qui se fonde sur la chronique Seder 'Olam Rabba attribuée à Rabbi Yose b. Halafta (iie s.). Cette ère, entrée en vigueur au Moyen Âge, remplaça progressivement la précédente, qui s'attarda pourtant en Orient jusqu'au xvie siècle (et au Yémen jusqu'au xxe s.). À côté de la mention de l'ère vulgaire, elle figure sur les calendriers liturgiques et profanes, sur les quotidiens israéliens et généralement sur les périodiques juifs de la diaspora. On la grave volontiers sur les sépultures.
Offrandes et prières
Lorsqu'ils ne se trouvent pas explicitement contenus dans la Tōrah, les rites y figurent sous une forme implicite que découvrira le Midraš. Ils sont codifiés par la halakha ou norme rabbinique : le Sulḥan 'Arukh de Joseph b. Ephraïm Caro (Venise, 1567) constitue la forme dernière de sa codification. Des rites agraires règlent la consommation des céréales autorisées après l'offrande d'une gerbe de prémices, l''omer, le 16 nissan (Lévitique, xxiii, 14), l'écoulement de trois années avant l'utilisation du fruit d'un arbre ('orla), les[...]
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Écrit par
- Gérard NAHON : directeur d'études émérite à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
- Charles TOUATI : docteur en théologie, docteur en histoire de la philosophie, docteur d'État ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)
Classification
Médias
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