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JUDO

Il revient à Jigorō Kanō (1860-1938) d'avoir trouvé la voie () de la souplesse (), développant ainsi l'antique jiu-jitsu — technique militaire apparue au xvie siècle puis tombée trois siècles plus tard, au seuil de l'ère Meiji, dans une progressive décadence — en un sport qui débuta fort modestement dans une salle exiguë de Tōkyō en 1882, avant de s'imposer peu à peu à travers le monde. Son principe ? L'utilisation à son profit de la force de l'adversaire, donc la capacité, grâce aux qualités de souplesse et d'adresse que favorise la vitesse d'exécution, à privilégier l'intelligence et la beauté du geste, conséquence de son efficacité : on le voit, le judo, c'est également une discipline intellectuelle et morale, on pourrait aller jusqu'à dire une philosophie. Au-delà des mystères de ses techniques — dont les Occidentaux étaient curieux —, cette conception, cet état d'esprit pouvaient-ils se trouver compris en dehors du Japon, et par exemple en France ? Ce fut le grand mérite du maître Mikonosuke Kawaishi (1889-1969), arrivé à Paris avant la Seconde Guerre mondiale, que d'imaginer la matérialisation, à travers des ceintures de couleur, des progrès du judoka, susceptible de passer en vingt-quatre mois de la ceinture blanche du débutant à la ceinture marron, après avoir ceint sa veste renforcée (judogi) de jaune, d'orange, de vert, puis de bleu. Alors lui reste à franchir l'étape décisive, celle qui le mènera jusqu'à la fameuse ceinture noire, laquelle n'est pas en elle-même un aboutissement puisqu'elle s'assortit de l'obtention éventuelle de degrés supplémentaires, les dans, susceptibles d'aller du premier jusqu'au rarissime dixième dan. La création simultanée en 1947 de la Fédération de judo et du Collège des ceintures noires souligne toute l'ambivalence de ce qui se veut autant une discipline qu'un sport.

Les deux hommes qui s'affrontent de nos jours le font sur le tapis (tatami) de 16 mètres par 16 mètres — la surface de combat (9 m × 9 m) et la zone de 1 mètre de largeur qui l'entoure étant seules « valables », le reste ne servant qu'à la sécurité — pour une durée variable, ne dépassant pas 5 minutes dans les grandes finales internationales et susceptible de se voir écourtée si une phase décisive a eu lieu valant à son auteur un ippon. Sinon les combattants sont départagés en tenant compte des waza-ari, yuko, koka et des pénalités éventuelles (shido). En cas d'égalité, une prolongation, dite gloden score, a lieu : le premier combattant qui réussit à marquer un avantage, ne serait-ce qu'un koka, est déclaré vainqueur. En cas de nouvelle égalité, l'arbitre et les deux juges l'épaulant rendront la décision (hantei).

Que l'action se déroule debout ou qu'elle se déroule au sol, qu'il y ait eu « projection » ou « contrôle », la préparation nécessaire au combat aura été longue et pénible, visant à développer à la fois toutes les qualités physiques, techniques et mentales du compétiteur. Le premier Championnat du Japon n'eut lieu qu'en 1934, précédant de neuf ans le Championnat de France. En 1951, huit pays participeront à Paris au premier Championnat d'Europe et dix-huit, cinq ans plus tard, au premier Championnat du monde à Tōkyō.

La multiplication progressive des catégories de poids a peu à peu battu en brèche le mythe du petit susceptible de venir à bout du gros, car, à préparation et qualités égales, la masse musculaire constitue inévitablement un facteur déterminant. C'est pourquoi le Japonais Yasuhiro Yamashita, champion du monde poids lourds dès 1979 et champion olympique en 1984, aura été quasi invincible et que le Français David Douillet, champion olympique des lourds en 1996 et[...]

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Écrit par

  • : écrivain, directeur du Musée du sport français, membre de l'Académie internationale olympique

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Autres références

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