MAZARIN JULES (1602-1661)
L'homme d'État
Le triomphe de l'absolutisme
« L'autorité du Roy, c'est le repos de l'État. » Cette autorité, les esprits les plus clairvoyants jugent alors qu'elle doit être absolue. Une souveraineté pleine et entière peut, seule, faire prévaloir l'intérêt général et juguler les féodalités renaissantes. L'obéissance au roi est gage de la paix publique. Pour le bien du royaume, Mazarin, qui « pleure des larmes de sang » sur les déchirements intérieurs, considère que le premier de ses devoirs est de sauvegarder l'absolutisme. Louis XIV doit être aussi puissant que l'a été son père. Mais, tant qu'il n'est pas majeur, sa responsabilité est plus théorique que réelle. C'est le drame de Mazarin de ne pouvoir, en fait, s'abriter, durant la minorité, derrière la volonté du roi pour faire face aux mécontents. Il est tenu pour l'auteur des décisions impopulaires. Sous la Fronde, lorsque le roi quitte sa capitale, c'est au cardinal qu'on reproche de remettre en cause, par ce départ, les accords conclus avec le Parlement et qui affaiblissaient le pouvoir royal. Dès lors Mazarin devient l'ennemi public. On respecte le souverain mais on attaque le ministre. Impavide sous les outrages, Mazarin se refuse à toute polémique qui rejaillirait sur le roi. Vaincu un moment par le nombre, exilé, attaqué dans son honneur et même dans sa dignité cardinalice, il ne désespère pas et reste fidèle à son maître. S'il finit par l'emporter, c'est grâce à une vigilance de tous les instants, à un réseau remarquable d'informations dont il dégage toujours l'essentiel, le fait révélateur, de même qu'à une connaissance si étendue des êtres et des choses qu'il peut, de loin, diriger les affaires et conseiller la reine (qu'il n'a, soit dit en passant, jamais épousée). Il sait ainsi que des ambitieux exploitent les mécontentements mais que ces opposants se jalousent et que leurs intérêts divergent. Or « ce que l'intérêt a uni, l'intérêt peut le désunir ». Il négocie donc sans cesse pour diviser ses adversaires. Surtout il est évident pour lui que le sort de l'absolutisme et celui du ministériat sont liés. Refuser au souverain le droit de gouverner avec les moyens et les gens de son choix, c'est le priver d'une de ses principales prérogatives. Le roi et son ministre doivent se sauver ou périr ensemble. La majorité de Louis XIV renverse d'ailleurs la situation et constitue une date clé dans l'histoire du ministère de Mazarin. Le roi est désormais reconnu pour le maître qui inspire la politique et impose sa volonté. Mais le triomphe de l'absolutisme est celui de Mazarin et de son « habile conduite ».
L'arbitre de l'Europe
Mazarin n'a pu donner sa mesure en temps de paix car les hostilités ont duré pendant tout son ministère, ou presque. Quand il arrive au pouvoir, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Milanais, la Catalogne, le Portugal servent déjà de champ de bataille. Lui-même ouvre un nouveau front sur les rives de Toscane et se voit contraint d'intervenir à Naples, obligeant ainsi les Espagnols à disperser leurs forces. De longues opérations, coûteuses en hommes et en armement, sont engagées en vue de conquérir des positions stratégiques. Les grandes victoires qui jalonnent la régence (Rocroy 1643, Fribourg 1644, Nordlingen 1645, Lens 1648) portent des coups décisifs à l'empereur qui se résigne à la paix. Mais la France, affaiblie par la Fronde, doit poursuivre la lutte contre l'Espagne. Elle ne parvient pas à terminer un conflit qui s'éternise. Bien que l'ennemi soit épuisé lui aussi, elle doit recourir à l'alliance anglaise. La bataille des Dunes (1658) permet enfin d'ouvrir les négociations de l'île des Faisans. Dans ces succès militaires, Mazarin a une large part. Il a poursuivi la guerre[...]
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Écrit par
- Madeleine LAURAIN-PORTEMER : chargée de recherche au C.N.R.S.
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