ATTOU KADER (1974- )

Accrorap ou la dimension universelle de la danse

En 1993, les fondateurs d'Accrorap s'associent au plasticien Gilles Rondot et transforment leur collectif en compagnie. Le succès est au rendez-vous : la biennale de la danse de Lyon leur commande, pour l'édition 1994, la création d'Athina, qui réunit des hip-hopeurs et une danseuse classique. À partir de 1996, Eric Mezino et Kader Attou restent seuls à la tête d'Accrorap. Leur pari : mettre en scène des rencontres, mélanger les publics, faire dialoguer culture savante et culture populaire. Ils provoquent une véritable réflexion sur cette nouvelle danse qu'est le hip-hop en posant les problèmes de transmission et de pédagogie, et en s'interrogeant sur son inscription dans l'histoire de la danse... La création de Kelkemo, en 1996, marque un tournant. Cette pièce naît d'une expérience très forte dans les camps de réfugiés bosniaques et croates à Zagreb, en 1994 et 1995. Dédiée aux enfants réfugiés, elle fait surgir la question du sens, la part de révolte, la dimension universelle de la danse.

En 1998, la compagnie se détache du principe de la création collective. Kader Attou construit alors ses propres projets. L'un des plus marquants sera Prière pour un fou (1999), qui réunit un chanteur marocain, un musicien du groupe français IAM et un plasticien venu du sud de l'Algérie. Conçue en plein drame algérien, cette chorégraphie évoque puissamment l'impossibilité du dialogue, la douleur et le déchirement qui touchent alors ce pays. Cette dimension humaine, traversée par un questionnement identitaire, en prise avec les chocs et les contradictions de notre époque, sera reprise et développée dans ses œuvres suivantes, notamment avec De l'autre côté de la mer (2002), un projet pédagogique mêlant hip-hopeurs algériens et jeunes danseurs français, et surtout Douar (2003). Dédiée aux milliers de disparus algériens, cette dernière pièce parle d'exil intérieur et de départs rêvés, d'une existence oblitérée par la peur et la fureur de vivre, laissant apparaître en filigrane une dimension autobiographique qu'il développera ensuite dans petiteshistoires.com (2008).