ABRAHAM KARL (1877-1925)
Psychanalyste allemand, un des plus fidèles et des plus orthodoxes disciples de Freud. Né à Brême dans une famille juive hanséatique, Karl Abraham reçoit d'abord une formation médicale classique. C'est à Zurich, dans la clinique du Burghölzli, fondée par C. G. Jung, qu'il s'initie à la psychiatrie et à la psychanalyse, jusqu'en 1907. À cette date, Abraham, devenu freudien, s'installe à Berlin, où il rencontre les mêmes difficultés que Freud à Vienne : isolement, opposition des médecins à la psychanalyse, pauvreté. En 1913, il est de ceux qui critiquent Jung, et il est désigné président de l'Association psychanalytique en 1924. Il forme de nombreux analystes : Helen Deutsch, Edward Glover, Melanie Klein, Theodor Reik, qui consacre à sa mémoire le livre suscité par l'annonce de sa mort, Variations psychanalytiques sur un thème de Mahler (The Haunting Melody).
On peut distinguer dans l'évolution d'Abraham trois périodes : de 1907 à 1910, il travaille dans des directions proches de celles de Freud, notamment sur la démence précoce et le trauma sexuel, et il fait paraître en 1909 un important essai intitulé Le Rêve et le mythe ; de 1910 à 1920, il se consacre à des travaux cliniques divers, portant sur des phénomènes précis (névroses de guerre, névroses dites du dimanche, éjaculation précoce) ; enfin, de 1921 à 1925, il produit une œuvre théorique originale, ayant essentiellement pour objet l'étude du caractère. C'est en ce domaine, ainsi que dans celui de la relation d'objet, que se situent ses innovations dans l'histoire de la théorie psychanalytique.
Abraham, développant des thèmes freudiens, définit le caractère comme « la somme des réactions instinctives d'une personne à l'égard de son environnement social ». Ainsi, le caractère oral s'exprime par la faim, dont les représentants peuvent être le goût de l'interrogation, la recherche de succès, la curiosité intellectuelle. Le caractère anal (1921) implique le goût de la propreté et de l'argent, pouvant aller jusqu'à l'avarice ; enfin, le caractère génital (1925) coordonne le narcissisme et l'ambivalence des premiers stades, ce qui rend possible la socialisation. Mais c'est sans doute à propos de la relation d'objet que Karl Abraham a proposé des formulations appelées à un succès d'autant plus large qu'elles ont été reprises par son illustre élève Melanie Klein. L'objet du désir, point de référence de toutes les relations, est le lieu de « séries métaboliques » fonctionnant par paires symétriques et opposées : prendre-rejeter, incorporer-évacuer, conserver-détruire. Tel est le fondement de l'ambivalence, système de relations inverses et simultanées, germe de la théorie kleinienne de l'introjection-projection.
Comme Freud, Karl Abraham manifeste un goût pour le phénomène linguistique, accentué chez lui par un polyglottisme marqué, un souci de la recherche anthropologique (sensible dans l'étude sur Amenhotep IV). Dans l'entourage de Freud, Abraham demeure une des figures dominantes, d'autant plus qu'il est l'un des rares à n'avoir pas eu de conflit avec le fondateur de la psychanalyse.
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Écrit par
- Catherine CLÉMENT : ancienne élève de l'École normale supérieure, agrégée de l'Université
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