LIEBKNECHT KARL (1871-1919)
Né à Leipzig, Karl Liebknecht est le fils d'un des fondateurs du Parti social-démocrate allemand, Wilhelm Liebknecht. Bachelier à dix-neuf ans, docteur en droit et en sciences politiques en 1897, il ouvre un cabinet d'avocat à Berlin avec son frère Theodor. C'est à cette époque qu'il commence à militer dans le parti socialiste.
Élu au conseil municipal de Berlin en 1901, Liebknecht se fait surtout l'avocat des militants socialistes poursuivis par le régime impérial. Il met l'accent sur l'action antimilitariste du parti et la lie à la nécessité de l'éducation et de l'organisation politique de la jeunesse. Malgré les réticences de la direction du parti et en dépit de la législation allemande qui interdit l'agitation politique parmi les jeunes, le mouvement Association des jeunes travailleurs d'Allemagne se constitue avec comme organe Jeune Garde (Junge Garde, et c'est à l'intention de la jeune organisation que Liebknecht rédige et publie, en 1907 à Leipzig, le rapport Militarismus und Antimilitarismus. Il y formule le fameux mot d'ordre : « L'ennemi principal est dans notre propre pays. »
Militant infatigable, il est porté en 1907 à la présidence de la Fédération internationale de la jeunesse socialiste. La même année, le tribunal du Reich le condamne à un an et demi de forteresse pour haute trahison. Il reste emprisonné à Glatz jusqu'au 1er juin 1909, ce qui n'empêche pas qu'il soit réélu au conseil municipal de Berlin, puis à la Chambre des députés de Prusse. Libéré, Liebknecht reprend ses activités d'avocat et de propagandiste ; ses interventions aux congrès du parti insistent sur l'importance de la jeunesse dans la lutte politique. En 1912, il est élu député au Reichstag et, dès lors, accentue sa dénonciation de la guerre qui vient : en 1913, il fait une tournée de conférences en Europe ; au congrès d'Iéna (sept. 1913), il prône la grève politique de masse contre la guerre.
Désemparé par l'effondrement du mouvement socialiste international en août 1914, Liebknecht vote, par discipline, les crédits de guerre au Reichstag ; mais la rencontre de Rosa Luxemburg et la tournée qu'il effectue sur le front, grâce à son mandat de député, le conduisent à refuser, seul parmi le groupe parlementaire socialiste, le vote des crédits de guerre en décembre 1914. Cependant, il commence à rassembler les socialistes hostiles à la politique de collaboration avec la bourgeoisie et devient le symbole de l'opposition révolutionnaire à la guerre ; exclu du groupe parlementaire S.P.D., il est mobilisé comme artilleur, mais il reste en relation avec le petit groupe déjà constitué, et son action se traduit, en décembre 1915, par le vote contre les crédits de guerre de vingt députés socialistes.
En 1916, les opposants à la guerre, rassemblés dans le groupe Die Internationale, réunis en conférence nationale, décident la création du bulletin Lettres de Spartacus et organisent le 1er mai une manifestation à Berlin sur les mots d'ordre : « À bas le gouvernement ! À bas la guerre ! » Liebknecht est arrêté et condamné à quatre ans de prison. Il reste interné jusqu'en octobre 1918. Comme lors de son premier internement, il travaille à son seul ouvrage théorique, qu'il ne terminera pas : Études sur les lois dynamiques du développement social (Studien über die Bewegungsgesetze der gesellschaftlichen Entwicklung). Il s'y révèle davantage héritier de l'humanisme des philosophes allemands des xviie et xviiie siècles que marxiste ; il s'attaque, notamment, à la théorie de la plus-value : « L'exploitation est un pur problème de distribution et non de production comme le présente Marx », écrit-il. Mais, sans nul doute, de l'aveu de ses compagnons, il compensait son manque de formation doctrinale « par un[...]
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Écrit par
- Paul CLAUDEL : maître en histoire et géographie
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