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MALDEN KARL (1912-2009)

Quoique de grande taille et mince, Karl Malden n'a jamais attiré l'attention par sa silhouette. En revanche, son visage, tête ronde aux cheveux clairsemés, percée de deux yeux ronds bleu clair mobiles et rieurs, est inoubliable à cause de la forme singulière de son nez, consécutive, nous dit son autobiographie, à une double fracture, advenue à l'époque où il pratiquait le basket-ball. Ce nez et ces yeux confèrent à Malden une dimension tout à la fois antipathique et sympathique, inquiétante et bonhomme. Ce qui, d'une certaine manière, concrétise l'ambiguïté de la plupart des personnages qu'il incarne, ou du moins de la perception « floue » que le spectateur en retire. Ainsi, la neutralité professionnelle du policier de I Confess (La Loi du silence) d'Alfred Hitchcock (1953), qui ne manifeste pas d'antipathie ni de sympathie pour les suspects, finit par se révéler dérangeante. À l'inverse, le chercheur d'or de The Hanging Tree (La Colline des potences) de Delmer Daves (1959), qui tente de violer l'héroïne, est un bon vivant, rigolard, généreux et d'une ingénuité désarmante. C'est que son jeu, sobre mais traversé de moments d'exagération, nourri de mouvements du corps ou des yeux, confère à ses personnages une vitalité et une existence charnelle rares.

Mladen Dorde Sekulovič est né le 22 mars 1912, à Chicago (Illinois), d'une mère tchèque et d'un père serbe. Il passe son enfance et son adolescence à Gary (Indiana). Comme son père, passionné de musique et de théâtre, crée une chorale et monte des pièces en langue serbe à l'église paroissiale, il participe à ces deux activités. Si bien qu'au cours de ses études secondaires il intègre la troupe théâtrale du lycée tout en devenant la star de l'équipe de basket-ball. Au terme de ses études, en 1931, n'ayant pas obtenu de bourse qui lui permette de s'adonner à sa passion, le basket-ball, il commence à travailler comme ouvrier métallurgiste, à l'instar de son père. En 1934, il décide de tenter sa chance sur les planches. Après avoir changé son nom en Karl Malden de peur d'être victime d'ostracisme, il retourne à Chicago pour y suivre durant trois ans, grâce à l'obtention d'une bourse, les cours d'art dramatique de la Goodman School. Son diplôme obtenu, sans engagement ni argent, il revient à Gary avant de partir pour New York où il débute peu après à Broadway, puis à la radio, de même qu'au Group Theatre, où il fait la connaissance d'Elia Kazan. Il fait même de modestes débuts au cinéma dans They Knew What They Wanted de Garson Kanin (1940).

La carrière naissante de Karl Malden est interrompue par la guerre durant laquelle il sert dans l'Air Force. Démobilisé, il remonte sur les planches où il obtient bientôt un succès personnel dans All my Sons d'Arthur Miller, mis en scène par Elia Kazan. Parallèlement, il tient de petits rôles au cinéma jusqu'à ce qu'il s'impose dans A Streetcar Named Desire (Un tramway nommé Désir) d'Elia Kazan (1951) où son interprétation lui vaut de remporter l'oscar. Après avoir lui-même réalisé un film, Time Limit (La Chute des héros ; 1957), il est de fait amené à quitter le théâtre pour se consacrer au grand écran où il crée quelques inoubliables personnages dans, entre autres, Ruby Gentry (La Furie du désir) de King Vidor (1953), On the Waterfront (Sur les quais) d'Elia Kazan (1954), Baby Doll (1956) du même metteur en scène, Fear Strikes Out (Prisonnier de la peur) de Robert Mulligan (1957), Birdman of Alcatraz (Le Prisonnier d'Alcatraz) de John Frankenheimer (1962), Cheyenne Autumn (Les Cheyennes) de John Ford (1964), The Cincinnati Kid (Le Kid de Cincinnati) de Norman Jewison (1965), Nevada Smith (Nevada Smith) de Henry Hathaway (1966) et Patton (Patton[...]

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, professeur d'histoire du cinéma

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