BACILEK KAROL (1896-1974)
Le nom de Karol Bacilek est étroitement lié à la période la plus sombre de l'histoire tchécoslovaque de l'après-guerre : les « procès » politiques des années 1950. Surnommé le Beria tchécoslovaque, Bacilek a été un des principaux organisateurs des procès contre Slansky et d'autres éminents dirigeants communistes et contre certains hauts responsables du Parti communiste slovaque accusés de « nationalisme bourgeois » et condamnés à de lourdes peines d'emprisonnement. Ministre de la Sécurité d'État de 1952 à 1953, il transforme la police politique en une redoutable force dotée d'une large autonomie d'action.
Né à Chotanky, près de Prague, Karol Bacilek, après un passage à l'usine comme ouvrier métallurgiste (1912-1915), est mobilisé dans l'armée austro-hongroise et envoyé sur le front italien. Condamné à trente mois de prison pour activités subversives durant la guerre, il rejoint après sa peine les rangs de l'aile gauche de la social-démocratie tchécoslovaque. C'est un des fondateurs du Parti communiste tchécoslovaque (P.C.T.) en 1921. Très tôt, il accède à des postes de responsabilité dans l'appareil du parti. Envoyé en Slovaquie pour organiser celui-ci, il devient rapidement secrétaire régional, puis responsable du secrétariat slovaque du P.C.T. Après un séjour à Moscou à l'École centrale des cadres, il retourne en Slovaquie, chargé de mener à bien la « bolchevisation » du parti.
En 1938, après l'interdiction du Parti communiste en Tchécoslovaquie, avec d'autres dirigeants communistes il gagne Moscou où il sert jusqu'en 1943 dans les rangs du N.K.V.D. En 1944, il est envoyé en Slovaquie pour participer à l'insurrection slovaque contre les Allemands et pour renforcer le noyau des dirigeants communistes de l'« intérieur ».
Après la Libération, Bacilek est nommé successivement membre du secrétariat à l'organisation du Parti communiste slovaque, responsable du département de l'Agriculture du comité central du P.C.T. De 1949 à 1953, il remplit les fonctions de président du Conseil des commissaires slovaques, ensuite de ministre du Contrôle d'État, de ministre de la Sécurité d'État (1952-1953) et de vice-Premier ministre (1953). De 1953 à 1963, il est le premier secrétaire du Parti communiste slovaque. Membre du comité central de 1929 à 1966, il a été membre du présidium du P.C.T. de 1951 à 1963.
Au cours des années 1960, la libéralisation relative du régime permet, entre autres, la réhabilitation juridique des condamnés des « procès » politiques, et la création d'une première commission d'enquête sur les « abus » des années 1950. Quelques hauts responsables de l'État et du parti sont alors destitués de leurs fonctions.
Bacilek est remplacé par Alexandre Dubček au poste de premier secrétaire du P.C.T. Mais aucune accusation officielle n'est portée contre lui pour le rôle qu'il a joué dans la mise en scène des « procès ».
Ce n'est qu'en 1968, lors du Printemps de Prague, que la direction du P.C.T. charge une commission composée de juristes, d'historiens et de cadres supérieurs du parti de faire toute la lumière sur les procès politiques des années 1950. Le « rapport sur les procès politiques et les réhabilitations en Tchécoslovaquie de 1949 à 1968 » (rapport Piller) préparé par la commission aurait dû être présenté devant le congrès du P.C.T. convoqué en septembre de la même année... Ce rapport met au jour la responsabilité écrasante de Bacilek dans la liquidation physique et les condamnations des dirigeants communistes dans les années 1950 ; il est alors exclu du Parti communiste.
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Écrit par
- Ilios YANNAKAKIS : maître assistant à l'université de Lille-III
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