SCHWENCKFELD VON OSSIG KASPAR (1489-1561)
« Spiritualiste évangélique », qui ne fonda pas d'Église, mais suivit un chemin original entre la réforme luthérienne et les divers courants de l'anabaptisme. Né en Silésie, Schwenckfeld fréquenta diverses universités, sans en ramener aucun diplôme ; chevalier de l'ordre Teutonique, il resta fidèle à son engagement au célibat. Ayant découvert, dès 1518, la pensée de Luther, il travailla pour la Réforme dans la principauté silésienne de Liegnitz.
En avril 1526, après plusieurs entrevues et échanges de lettres, la rupture est totale entre Luther, d'une part, Schwenckfeld et son ami Valentin Crautwald, d'autre part. Schwenckfeld attend de l'homme croyant un progrès moral effectif, qu'il juge possible par la foi, lien quasi concret avec le Christ glorifié. Affirmer, avec Luther, la simultanéité, en l'homme croyant, du juste et du pécheur lui semble une erreur. Il comprend ainsi les paroles d'institution de l'eucharistie : « Mon corps est ceci, à savoir du pain, nourriture véritable de l'âme. » La foi, répondant à une telle offre de lui-même par Jésus-Christ, peut engendrer une réelle sanctification et se passer d'appuis extérieurs. Schwenckfeld, au même moment, décide de s'abstenir de toute participation à l'eucharistie : c'est le Stillstand.
Lorsqu'il rompt avec Luther, il doit, du fait de l'avènement de Ferdinand, roi de Hongrie et de Bohême, s'éloigner de Liegnitz, où il apparaît comme pouvant compromettre l'affermissement de la réforme luthérienne. Le « radical » Kaspar s'éloigne le 19 avril 1529 de sa terre natale. Il se rend à Strasbourg, où, jusqu'en juillet 1534, il vit la période, assez extraordinaire, au cours de laquelle divers courants anabaptistes se croisent et rejoignent une œuvre de réforme d'un autre type, conduite par Martin Bucer. Il est accueilli par Capiton, Zell, Bucer lui-même, et rencontre Ziegler, Marbeck, Hoffmann, Franck, Rothmann. Cherchant non à instituer une Église, mais à grouper des « spirituels », Schwenckfeld est assez vite isolé des autres radicaux.
Après le synode de juin 1533, qui permet à l'Église de Strasbourg de s'organiser, il doit s'éloigner. Il s'établit d'abord à Ulm : le bourgmestre Besserer l'accueille, mais le luthérien Frecht lui est très hostile. En septembre 1539, il se retire au château de Justingen. Quelques mois plus tard, sa théologie est condamnée par les membres de la ligue de Smalkalde. Dès lors et jusqu'à la fin de sa vie, Schwenckfeld s'efforce, tout en visitant ses amis (surtout en Allemagne du Sud) et en leur écrivant, de prendre ses distances vis-à-vis des anabaptistes. Une longue polémique, dont les traces littéraires sont nombreuses, l'oppose à Marbeck : « anabaptisme évangélique et spiritualisme évangélique » (H. G. Williams) s'affrontent sur des questions majeures telles que le baptême, le rapport de l'Ancien et du Nouveau Testament, les relations avec la société, l'anthropologie. Schwenckfeld, qui accentue les oppositions entre âme et corps, externe et interne, a une approche plus positive de la question du rapport avec les autorités et reste un avocat ardent de la tolérance. Le débat se poursuit après la mort de Marbeck. À partir de 1547, Kaspar vit au monastère franciscain d'Esslingen. En 1561, il se réfugie dans une maison amie, à Ulm, où il meurt. Ses œuvres ont été rassemblées dans le Corpus Schwenckfeldianorum, t. I-XVIII (1907-1961).
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Écrit par
- Bernard ROUSSEL : professeur à la faculté protestante de théologie de Strasbourg
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