Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CLARK KENNETH (1903-1983)

Fils unique d'une famille de « riches oisifs », selon sa propre expression, Kenneth Clark, qui naquit à Londres, connut une enfance insouciante, rythmée par les fastueuses parties de chasse paternelles dans la grande propriété du Suffolk et les hivers de douceur et de luxe sur la Riviera française. Il fait ses études à Winchester, puis à Oxford. Dans son autobiographie en deux volets, Another Part of the Wood (1974) et The Other Half (1978), il consacre un chapitre à ce qu'il appelle « la formation d'un esthète ». Enfant, il copie les eaux-fortes de Rembrandt, les estampes japonaises et les moulages de sculptures florentines, puis dessine dans un carnet les édifices gothiques qui furent le cadre de sa vie de collège. Des lectures, des rencontres et des conférences le font s'orienter vers la critique et l'histoire de l'art. À Oxford, le conservateur de l'Ashmolean Museum, Charles Bell, lui fait étudier les dessins de Raphaël et de Michel-Ange ; il y découvre aussi l'harmonie de la sculpture antique qui demeura toujours pour lui un moment artistique essentiel.

C. Bell lui conseilla le sujet de son premier livre : le mouvement néo-gothique anglais. Conçu à l'origine comme l'explication historique et culturelle d'un courant architectural alors perçu comme une « infortune nationale », The Gothic Revival (1928) devait rapidement dépasser le stade de la satire et apporter une première vue d'ensemble, perspicace et nuancée, sur les inspirateurs, les acteurs et les interprètes de ce mouvement. En 1925, Kenneth Clark entreprend une série de voyages en Allemagne, en Hollande et en Italie. C'est à Florence qu'il rencontre l'illustre « connaisseur » de l'art italien de la Renaissance, Bernard Berenson, alors au faîte de sa gloire, qui lui propose de collaborer à une nouvelle édition de ses Florentine Drawings. À la villa I Tatti à Settignano près de Florence, il apprend à mettre en œuvre la mémoire visuelle, les facultés d'analyse qui, appuyées par une sensibilité très fine, constituaient la base du travail critique de Berenson.

Après un premier voyage à Rome, ville qui le stupéfie, Clark rentre en Angleterre où il est bientôt invité à dresser un catalogue des dessins de Léonard de Vinci conservés à la Royal Library de Windsor (catalogue paru en 1935). En 1930, il participe à la grande exposition de peinture italienne à Burlington House et donne ses premières conférences publiques sur Botticelli, Giotto et Giovanni Bellini. La pratique des conférences, avec les qualités que cela requiert, faculté de synthèse, clarté d'exposition, grain d'originalité et enthousiasme communicatif, est l'un des apports majeurs de Clark à l'histoire de l'art. Les textes qu'il écrivit à cette occasion, soigneusement révisés, évitant l'érudition stérile, risquant des comparaisons inédites et des jugements personnels dictés par une intuition très sûre, sont la base de la plupart de ses ouvrages. Il sut toujours répondre aux suggestions extérieures, même les plus difficiles, par des « esquisses », des introductions concises mais riches de réflexions et de développements possibles. Il aborda ainsi des études thématiques diverses : The Nude (1956), Animals and Men (1977, écrit à la demande du Fonds international de la vie sauvage), Feminine Beauty (1980).

Vers 1932 commence ce que Kenneth Clark appela lui-même avec humour « The Great Clark Boom » ; il est conservateur du département des beaux-arts de l'Ashmolean Museum, puis, à trente ans, directeur de la National Gallery de Londres et chargé par George V du soin des collections royales. Il est anobli en 1938. Sa direction de la National Gallery est marquée par deux désirs : acquérir quelques tableaux de premier ordre (Sassetta, Rembrandt, Poussin, Bosch) et moderniser un accrochage démodé. De 1946[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, maître de conférences en histoire de l'art des Temps modernes à l'université de Provence

Classification

Autres références

  • BRACELLI GIOVANNI BATTISTA (1re moitié XVIIe s.)

    • Écrit par
    • 524 mots

    On ignore tout de la vie de cet artiste florentin qui est devenu subitement célèbre vers 1930, quand nombre d'artistes de l'avant-garde découvrirent en lui un étonnant précurseur. Les quelques gravures que l'on connaît de lui situent son activité entre 1624 et 1649, principalement à Rome, semble-t-il....

  • CULTURE - Culture et civilisation

    • Écrit par
    • 14 361 mots
    • 2 médias
    Encore faudra-t-il éviter de confondre, à cet égard, la cohésion interne de la société avec la stabilité de leur implantation territoriale – ainsi que le fait Kenneth Clark dans son étude, au demeurant si attachante, des grands moments de la civilisation occidentale (Civilisation, trad., Paris,...
  • NU

    • Écrit par
    • 2 136 mots
    • 5 médias
    On peut se demander si même l'art abstrait est parvenu à éliminer la représentation du nu. Kenneth Clark s'interroge justement : « N'est-ce pas parce que certaines formes quasi géométriques sont des images simplifiées des formes qui nous plaisent dans le corps féminin qu'elles nous sont agréables...