Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

GREISEN KENNETH I. (1918-2007)

L'astrophysicien américain Kenneth I. Greisen, décédé le 17 mars 2007 à Ithaca dans l'État de New York, a eu un rôle de pionnier dans les études des rayons cosmiques de très haute énergie. Né à Perth Amboy, dans le New-Jersey, le 24 janvier 1918, Greisen commence ses études universitaires au Franklin and Marshall College à Lancaster en Pennsylvanie. Il y est distingué comme le meilleur étudiant en 1938 et choisit l'université Cornell pour ses études doctorales. Après avoir hésité entre la physique théorique et la recherche expérimentale, il s'adresse au physicien italien Bruno Rossi (1905-1993) qui venait juste d'être nommé assistant professeur à Cornell et devient son premier étudiant américain. Tous deux mettent au point un détecteur à base de compteurs Geiger pour mesurer l'atténuation atmosphérique des « mésotrons », ces particules détectées dans les rayons cosmiques dès 1937 qu'on avait de façon erronée identifiées aux mésons de Yukawa alors qu'il s'agissait de leptons (ou muons). Effectuées à haute altitude, ces mesures permettent d'estimer les durées de vie de ces particules tout en vérifiant les lois relativistes de dilatation des durées, le repère temporel lié à la particule rapide étant très différent de celui qui est lié à l'appareil de mesure.

Tout en préparant ces expériences, il participe avec Rossi à l'écriture de son premier article scientifique, titré « Théorie des rayons cosmiques ». Publié en 1941 dans Reviews of Modern Physics, cet exposé complet des fondements de la physique des rayons cosmiques et de leurs interactions avec l'atmosphère devient rapidement un classique de ce domaine de recherche. Après sa thèse de doctorat soutenue en 1942, Greisen rejoint, comme son directeur de thèse, le groupe de physiciens et d'ingénieurs qui, au sein du projet Manhattan, mettent au point la bombe nucléaire à Los Alamos. Spécialiste des problèmes de détonateurs, il participe dans un poste avancé (à une quinzaine de kilomètres du point d'impact) à l'observation de la première explosion, l'opération Trinity, le 16 juillet 1945. Selon le rapport confidentiel (mais déclassifié maintenant) qu'il transmet, « la chaleur et la lumière étaient comme si le Soleil était soudain apparu avec une brillance exceptionnelle. Un gigantesque nuage de fumée s'élevait, et certaines parties en étaient jaunes et rouges vifs, comme un nuage au crépuscule. Ces parties étaient en mouvement continuel... ». Peu après, il remarque qu'« un halo bleu entoure le nuage » et qu'une onde de choc apparaît comme « une zone circulaire d'un jaune très brillant, proche du sol et dont le front avance lentement vers eux ». L'onde sonore qui l'accompagne les atteint moins d'une minute après l'explosion, sous la forme du bruit « décevant » d'un roulement de tonnerre. Le groupe de spectateurs se réunit alors pour célébrer bruyamment l'événement.

En 1946, comme la plupart de ses collègues, Greisen rejoint le monde universitaire. Assistant puis professeur à l'université Cornell, il y développe un ambitieux programme d'étude des rayons cosmiques. Il joue un rôle de pionnier dans le développement d'observatoires souterrains, par exemple au début des années 1950, dans une mine de sel proche de l'université. La raison de tels détecteurs est de faire jouer à la terre le rôle d'un filtre ne laissant passer que des muons de haute énergie, ce qui permet la sélection de rayons cosmiques de très haute énergie. Son équipe obtient aussi d'intéressants résultats à partir d'appareils de détection liés à des ballons s'élevant à plusieurs dizaines de kilomètres d'altitude. Un article au titre interrogatif, « Une fin au spectre des rayons cosmiques ? » rendra célèbre Greisen en avril 1966. Il y démontre que la présence[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau

Classification