KHĀN ou CARAVANSÉRAIL
Le khān ou caravansérail est une institution en relation avec l'organisation commerciale dans les pays islamiques. On en connaît fort mal l'évolution, car les khāns sont situés bien souvent loin des routes actuelles. Le khān naquit du besoin de se protéger contre le pillage dans des régions où nomades et montagnards faisaient régner l'insécurité. Distants en général d'une journée de marche, les khāns servent, sur les routes, de relais près des portes de la ville ; à l'intérieur des cités, ce sont des entrepôts et des hôtelleries. Le programme architectural concilie donc la sécurité des gens et des bêtes avec les commodités des entrepôts pour marchandises ; il comprend des écuries, des dépôts, des boutiques et souvent un bain, des chambres à coucher ainsi qu'un oratoire. De l'extérieur, le khān a l'allure d'un fortin avec des tours à chaque angle, des façades aveugles renforcées par des contreforts, et une entrée monumentale parfois saillante. Le matériau de construction change selon les régions. Le plan, les dimensions, le nombre de logements évoluent selon les lieux et les époques. Ceux qui subsistent permettent de dégager des particularités architecturales de groupes typologiques. Il y a les khāns seldjoukides d'Iran et d'Anatolie, les khāns ayyoubides de Syrie, les khāns mamelouks d'Égypte et de Syrie, ceux de la route du Pèlerinage, les khāns ilkhanides et séfévides d'Iran, enfin les khāns ottomans d'Asie antérieure.
Le khān de l'époque seldjoukide en Iran (fin xie s.) est de plan carré, avec des tours rondes aux angles ; au centre de la façade, un haut portail flanqué de tours donne accès à la cour sur laquelle s'ouvrent quatre iwāns. Il y a trois types de khāns seldjoukides d'Anatolie aux xiiie et xive siècles : le khān avec cour centrale rectangulaire bordée de galeries voûtées et de chambres, doté d'une entrée monumentale à vestibule comme Sultan Khān (1236) entre Sivas et Kayseri ; le khān couvert comme Susuz Khān (1246) près de Burdur ; enfin certains khāns combinent la cour et le bâtiment couvert juxtaposés comme Sultan Khān (1229) à Aksaray. Ils sont remarquables par leur grand portail à arc brisé orné de stalactites dans un encadrement d'entrelacs géométriques finement ouvragés comportant souvent des décors figurés. Le type ayyoubide en Syrie (xiiie-xive s.) est de plan carré ou rectangulaire à cour centrale, avec galerie périphérique voûtée en berceau, interrompue suivant l'axe principal par un couloir d'entrée ayant, dans certains cas, une pièce de part et d'autre du vestibule. La porte peut être précédée d'un saillant (al-kutayfé). À l'époque mamelouke (xve s.), le khān est rectangulaire avec murs aveugles, cour centrale et bassin, galerie périphérique voûtée d'arêtes ou en berceau, il englobe une mosquée et souvent un bain ; le portail s'ouvre dans la façade ou dans un avant-corps, et le couloir d'entrée est flanqué de deux pièces voûtées, tel le khān Ayash près de Damas. Ce type survit au xviie siècle. On retrouve près de Bakou un khān du xve siècle, de plan et de dispositions identiques. En Iran, à l'époque des Ilkhanides un nouveau type apparaît. C'est un bâtiment de plan rectangulaire dont les murs sont renforcés de tours d'angle semi-circulaires ; il est doté d'une entrée monumentale formant bastion. Des pièces de logement et des iwāns s'ouvrent dans les grands axes sur une vaste cour où se trouvent une fontaine, des citernes et, au centre, une mosquée. Ces khāns ont souvent deux étages à galerie : au rez-de-chaussée les écuries, les magasins et les boutiques, à l'étage les logements. Dans l'Empire ottoman, aux xvie et xviie siècles, un autre type apparaît : celui d'un large passage[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Nikita ELISSÉEFF : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Lyon
Classification
Média
Autres références
-
BAZAR
- Écrit par Marianne BARRUCAND
- 3 350 mots
- 8 médias
Le khān, ou funduq, est un ensemble architectural organisé autour d'une cour centrale généralement pourvue de portiques et accessible par une seule entrée ; située à l'intérieur ou à la périphérie du bazar principal, il a toujours eu des fonctions multiples et peu précises, pouvant servir de demeure... -
CAIRE LE
- Écrit par Éric DENIS et Gaston WIET
- 5 853 mots
- 7 médias
...logement des négociants ; c'est ce qu'on appela des caravansérails, des fondouks, ou encore des okelles (transcription de l'arabe), ou enfin des khan(vocable persan) : édifices carrés, construits autour d'une grande cour, avec un portique qui abritait une galerie ; le rez-de-chaussée était réservé... -
DAMAS
- Écrit par Nikita ELISSÉEFF et Éric VERDEIL
- 3 384 mots
- 5 médias
...Mamelouks en 1516 et ramène la sécurité intérieure ; le commerce refleurit, les routes sont sûres, les caravansérails se multiplient. À Damas, le plus beau khānest celui d'Asad Pasha, avec ses neuf coupoles et son appareil bichrome (1752). Un nouveau type architectural apparaît alors : la mosquée turque... -
SOUK
- Écrit par Nikita ELISSÉEFF
- 1 438 mots
Le mot souk viendrait de l'araméen shūkā, avec le sens primitif de rue, puis celui de marché. On le trouve dans la composition de nombreux toponymes. Très tôt, ce terme recouvre différents types de centres d'activité commerciale dans le Proche-Orient et au Maghreb. On distingue les foires...