KONJAKU MONOGATARI SHŪ
Véritable encyclopédie anecdotique, en langue japonaise, de l'Inde, de la Chine et du Japon, le Konjaku monogatari shū est un recueil de plus d'un millier de contes composé vers la fin du xie siècle. Si la grande majorité de ses thèmes sont d'inspiration bouddhique, il contient cependant un certain nombre de récits profanes, qui apportent des lumières précieuses sur la vie des classes sociales que la littérature aristocratique de l'époque ignorait totalement.
Tous les contes commencent par la formule ima wa mukashi qui pourrait se traduire à peu près par « déjà jadis », et dont la lecture, « à la chinoise », est konjaku, d'où le titre du recueil. Il s'agit là d'une formule stéréotypée à la manière de notre « il était une fois », mais en raison de la nature de la plupart des anecdotes, il est possible que sa constante répétition soit une référence à la fuite inéluctable du temps, à l'universelle impermanence, qui est l'une des idées fondamentales du bouddhisme.
Controverses sur l'auteur
L'Uji shūi monogatari (Complément aux contes d'Uji), recueil des environs de l'an 1200, rapporte que le dainagon (grand conseiller) Minamoto no Takakuni (1004-1077), retiré dans sa résidence d'Uji, au sud de Kyōto, invitait les voyageurs de passage et se faisait conter par eux les légendes des divers pays, qu'il consignait dans un gros livre. La description qui est donnée de ces Contes du grand conseiller d'Uji (Uji dainagon monogatari), dont divers documents attestent l'existence jusqu'au xive siècle, pourrait fort bien s'appliquer au Konjaku, et certains passages qui en sont cités se retrouvent effectivement dans ce dernier. On a donc longtemps admis qu'il s'agissait d'un seul et même ouvrage, et que le Dainagon en était l'auteur. Cette attribution a été remise en question par des philologues modernes qui ont relevé dans certains contes des allusions à des faits postérieurs à la mort de Takakuni ; l'argument n'est toutefois guère probant, car de tous les genres littéraires le conte est évidemment celui qui admet le plus aisément les additions. Plus sérieuse paraissait l'objection fondée sur la profonde connaissance de la doctrine bouddhique que révélait le texte ; or, en 1938, l'on retrouvait un livre de méditations religieuses, l'Anyōshū, rédigé par Takakuni à la fin de sa vie. Si le problème n'en est pas résolu pour autant, partisans et adversaires de celui-ci semblent dans l'ensemble admettre que la remarquable unité de style et d'inspiration du recueil plaide en faveur d'un auteur unique.
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Écrit par
- René SIEFFERT : professeur à l'Institut national des langues et civilisations orientales
Classification
Autres références
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