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FÉDINE KONSTANTIN ALEXANDROVITCH (1892-1977)

Né dans une famille de petits-bourgeois de Saratov, Fédine se retrouve, après des études commerciales, en Allemagne pendant la Première Guerre mondiale. C'est son premier séjour en Occident. Un Occident qu'il connaît bien et qu'il a souvent représenté dans ses œuvres. Pendant la guerre civile, il est journaliste et prend parti pour le pouvoir soviétique. À Petrograd, il devient, à partir de 1921, l'un des Frères Sérapion, dont il partage l'intérêt pour le renouvellement de la langue et du récit, quoique étant le plus classique du groupe. Il prend pour sujets la vie de province figée dans Anna Timofeevna (1923), le Petrograd affamé dans Âmes de chien (Pës'i duši, 1922) ; il s'intéresse aux laissés-pour-compte de la société, au statut de l'intellectuel, à la violence et à la justice pendant la révolution et la guerre civile, dans Les Cités et les années (Goroda i gody, 1924), œuvre forte, complexe, sûrement son chef-d'œuvre ; il se tourne vers le monde des paysans, ses mœurs, sa mentalité dans Transvaal (1926). Après le roman Les Frères (Brat'ja, 1928), où s'opposent l'intellectuel et le révolutionnaire, et où on trouve encore l'influence de Dostoïevski, Fédine fait de Tolstoï son maître sur le plan formel ; comme beaucoup d'autres, il peindra « l'homme nouveau socialiste ». Le roman L'Enlèvement d'Europe (Pokhiščenie Evropy, 1935) met face à face le monde capitaliste en crise et la Russie soviétique du Ier plan quinquennal. Sur le modèle de Guerre et Paix, la trilogie, Premières Joies (Pervye Radosti, 1945) suivies de Un été extraordinaire (Neobyknovennoe Leto, 1948) et du Brasier (Kostër, non terminé), est le type même de ces tableaux épiques peignant la Russie de la première moitié du siècle que le pouvoir attend des écrivains qui ont embrassé la cause du réalisme socialiste et la théorie du « héros positif ». Outre les œuvres de fiction, Fédine fait revivre avec talent et sincérité, dans Gorki parmi nous (Gor'ki sredi nas, 1941-1944), la vie littéraire des années 1920. À partir de 1959, son activité de dirigeant de l'Union des écrivains prend le pas sur le reste ; il y joue un rôle assez néfaste, critiquant les partisans les plus courageux du dégel et prenant une part active à l'exclusion de Pasternak et à l'interdiction du Pavillon des cancéreux de Soljénitsyne. « Il est l'incarnation de la littérature soviétique », a-t-on écrit : ayant vécu toutes les époques de la littérature soviétique, passé de la prose ornementale au classicisme tolstoïen, du désengagement au réalisme socialiste, couvert d'honneurs, Fédine pouvait, en un sens, y prétendre.

— Alexis BERELOWITCH

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, maître de conférences à l'université de Paris-Sorbonne

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