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PAOUSTOVSKI KONSTANTIN GUEORGUIEVITCH (1892-1968)

Vagabond et théoricien

Paoustovski, dans une notice autobiographique, partage sa vie en trois périodes. Après s'être enthousiasmé pour le Midi, il découvre le charme viril de la Carélie qu'il romance dans Severnaja povest' (1939, Nouvelle nordique) et Dym otečestva (1944, Fumées de la patrie). Mais l'exotisme du Midi et du Nord cédera la place à l'écologie. « La plus heureuse et la plus féconde période fut ma rencontre avec la zone centrale de la Russie [...] qui me conquit à jamais. C'était ma véritable patrie et jusqu'à la moelle des os je me sentis russe. » Vers la cinquantaine, il s'attache passionnément aux forêts et écrit ses livres les plus beaux et les plus sobres : Povest' o lesakh (1948, Nouvelles forestières), et son œuvre majeure Povest' o žizni (1955-1963, Récit d'une vie). Les premières s'ouvrent par un récit sur Tchaïkovski, désespéré de voir abattre les arbres séculaires. Avant la lettre, c'est un homme de l'« environnement ».

Tous ses récits sur ses errances « parmi les gens » sont mêlés à des réflexions sur l'art d'écrire. Sa langue est d'une limpidité classique, bien que, excellent styliste, il sache archaïser le langage, rendre le parler des paysans comme le chantonnement du Midi, où il s'était lié au groupe dit d'Odessa : Babel, Olécha, Kataev, Bagritski. Poète de la nature, jamais il ne distille l'ennui propre au style « descriptif ». Ses nouvelles fourmillent de figures vivantes, pittoresques. Il consacre aussi de nombreuses études à des écrivains ou à des peintres (le paysagiste Lévitan, poète des plaines monotones mais inspirées de la Russie centrale, est son préféré) ; mais les gens du peuple lui sont le plus proches. Paoustovski a fait un livre sur l'art d'écrire, Zolotaja roza (1955-1964, La Rose d'or). Loin d'être un traité théorique, c'est, comme tous ses livres, un mélange de nouvelles, de descriptions animées et de digressions lyriques. Dans son autobiographie (Récit d'une vie), il reprend tous ses thèmes favoris en les expliquant « du dedans », en intellectuel idéaliste, dévoué à la révolution mais empêché, par son humanisme foncier, d'en accepter les rigueurs. Son respect de la personne et de la liberté de l'artiste l'a poussé plus d'une fois à élever la voix, mais sans faire d'éclat. En Russie, son nom est synonyme de probité professionnelle et intellectuelle.

— Nina GOURFINKEL

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