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MENON KRISHNA (1897-1974)

Vengabil Krishnan Kungi-Krishna Menon est issu d'une famille assez aisée du Kerala, dans le sud-ouest de l'Inde. Son père est un juriste libéral qui décide de l'élever à la britannique dès son plus jeune âge. En 1915, Krishna Menon entre à l'université de Madras. Il va prendre conscience du fait nationaliste indien et de la nécessité de se lancer dans l'action politique.

Pendant quelques années, il s'occupe de mouvements de jeunesse puis, en 1924, s'embarque pour Londres.

Admirateur du théoricien travailliste Laski, brillant étudiant, auteur d'une thèse, Les Processus mentaux du raisonnement, d'une autre sur la pensée politique britannique au xviie siècle, il est évidemment touché par le mouvement de désobéissance civique lancé dans son pays par Gandhi. Il collectionne les diplômes tout en militant pour la libération du sous-continent. Il se découvre un tempérament d'homme de gauche et se fait élire en 1934 conseiller municipal du quartier londonien de Saint-Pancras. Il voyage, après avoir rencontré Nehru, représente, à Bruxelles en 1936, le parti indien du Congrès à une réunion consacrée au maintien de la paix et se rend en 1938 (avec Nehru) en Espagne, du côté républicain bien entendu. Il ne se sent guère attiré par la révolution soviétique, mais la crise des démocraties occidentales l'impressionne fortement. Pendant la guerre, il se comporte, sous les bombes allemandes, en bon citoyen britannique mais finit par rompre avec les travaillistes, dont la politique coloniale lui paraît trop timorée. Lorsque l'Inde devient indépendante en 1947, il est naturellement nommé haut-commissaire de New Delhi à Londres.

C'est en 1952 qu'il effectue sa percée sur la scène internationale : il est envoyé à l'O.N.U. pour représenter son pays tout en devenant membre de la Chambre haute indienne pour le Madras. Il se fait rapidement le champion du non-alignement, jouant un rôle dans toutes les grandes affaires et s'attirant les foudres d'Eisenhower et de Foster Dulles, qui ne comprennent guère qu'on ne soit pas aussi anticommuniste qu'eux. Il rencontre Zhou Enlai à Genève en 1954, lors de la conférence sur l'Indochine, préparant ainsi la voie à une discussion entre le dirigeant chinois et Nehru. Apôtre de la solidarité entre pays asiatiques et africains, il prend une part active à la préparation de la grande Conférence de Bandung, au cours de laquelle le Tiers Monde surgit dans la conscience de l'humanité tout entière. En 1955, il se rend en Chine. L'année suivante, désormais ministre sans portefeuille, il condamne avec une grande violence l'expédition franco-britannique à Suez mais est plus que modéré lorsqu'il s'agit de parler à l'O.N.U. de l'attaque soviétique en Hongrie. Il se distingue aussi par un discours fleuve à l'O.N.U. dans lequel il défend la politique indienne au Cachemire.

Le prestige international de Menon est alors à son zénith. Il va très rapidement baisser lors du retour en Inde du fougueux orateur. Pour la première fois, il va avoir l'occasion d'œuvrer dans son pays. Nommé, en avril 1957, ministre de la Défense, il se fait élire député de Bombay. Relativement prosoviétique, peu disposé à écouter les thèses chinoises, il est chargé de réorganiser une armée qui, lors des combats frontaliers de 1962, ne fait pas le poids face aux soldats de Mao Zedong. À la fin de l'année, Nehru le prie de quitter le gouvernement.

Sa chute s'accélère lorsqu'en décembre 1966 il claque la porte du parti du Congrès pour des raisons politiques (le mouvement glissant à droite) et personnelles (son caractère difficile indispose bien des gens, et Nehru n'est plus là pour le défendre). Il bataille encore, est battu comme candidat indépendant puis réélu avec l'appui du Parti communiste prosoviétique,[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École nationale d'administration, chef de la rubrique Asie du Sud-Est au journal Le Monde

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