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GÖDEL KURT (1906-1978)

L'œuvre

Les travaux de Gödel ont été exposés et situés dans leur contexte mathématique et épistémologique (cf. logique mathématique, hilbert, fondements des mathématiques et problèmes de hilbert). Aussi nous contenterons-nous ici d'un bref aperçu.

Le premier grand résultat est celui de la complétude du calcul des prédicats. Dans leur Grundzüge der Theoretischen Logik, paru en 1928, Hilbert et Ackermann, poursuivant le « programme » de formalisation des mathématiques, posent la question suivante : étant donné un système formel défini par un langage, des axiomes, des règles de déduction et une notion d'interprétation dans certaines structures mathématiques, est-il vrai que toute assertion vérifiée dans toute interprétation est formellement déductible des axiomes (la réciproque étant quasi évidente) ? La réponse affirmative qu'apporte Gödel confirme le caractère complet des règles de déduction formelle énoncées par Frege, leur ôtant a posteriori leur caractère arbitraire, et ouvre la voie au double développement de l'étude syntaxique des propositions non réfutables et de l'étude sémantique des interprétations vérifiant un ensemble donné d'assertions (étude qui a pris le nom de théorie des modèles). Une conséquence immédiate mais fondamentale du théorème de complétude est le théorème de compacité, qui exprime le caractère fini de la propriété : l'ensemble X d'assertions est vérifié dans une certaine interprétation.

Les théorèmes d'incomplétude constituent la deuxième grande découverte de Gödel. Conformément à son « programme », Hilbert cherchait à démontrer (de manière finitiste) la consistance d'un système formel de l'analyse. Un rapide examen convainquit Gödel de l'impossibilité d'une telle démonstration. Mieux, il prouva que tout système formel assez puissant pour inclure un minimum d'arithmétique, de théorie des ensembles ou de théorie des types comprend des propositions indécidables : par exemple, il existe une proposition de l'arithmétique que les axiomes de Peano ne peuvent ni démontrer ni réfuter, et qui est vraie dans l'ensemble des entiers naturels.

Ce premier théorème d'incomplétude s'exprime formellement de telle manière qu'il est possible de transformer sa démonstration en dérivation formelle. D'où le second théorème d'incomplétude : dans tout système S vérifiant certaines conditions minimales, la consistance de S ne peut être formellement établie. Ces résultats, aux conséquences épistémologiques considérables, marquaient les limites internes du formalisme, mettaient fin aux espoirs finitistes de Hilbert, et réfutaient en même temps son critère d'existence des objets mathématiques, mesurée à la consistance de l'assertion de leur existence.

Dès 1936, Gentzen donnait une démonstration de la consistance de l'arithmétique ; d'autres allaient suivre. Mais chacune met (nécessairement) en jeu des mécanismes déductifs non formalisables dans le système dont la consistance est étudiée. Dans son article de 1958, où il livre notamment une nouvelle preuve de la consistance de l'arithmétique, Gödel va jusqu'à interpréter son (second) théorème d'incomplétude comme exprimant la nécessité, pour une telle preuve, de faire intervenir des notions abstraites engageant la signification (et non les seules propriétés perceptives, concrètes) des combinaisons finies de symboles du système.

Les résultats d'incomplétude conduisaient également à la définition générale de fonction récursive, par Herbrand et Gödel, et à l'élucidation par Turing de la notion de calculabilité, qui permettait de dégager la véritable généralité des théorèmes de Gödel.

C'est en théorie des ensembles, à l'axiomatisation de laquelle il contribua,[...]

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Écrit par

  • : professeur de philosophie à l'université de Paris-IV-Sorbonne, ancien directeur du département d'études cognitives, École normale supérieure

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