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GOLDSTEIN KURT (1878-1965)

Représentant une heureuse synthèse entre la neurologie, la neuropsychiatrie et la psychologie, l'œuvre de Kurt Goldstein, d'une importance capitale dans l'évolution de la psychologie clinique, constitue pour cette raison une véritable biologie du sujet humain et fournit le modèle d'une psychologie physiologique débarrassée des influences mécanistes, qui ont engagé les premiers psychophysiciens et les expérimentalistes associationnistes sur la voie d'une négation et, ultérieurement, d'une récupération a posteriori de la subjectivité. Élève de Wernicke et d'Edinger, il retira de leurs enseignements la conviction que la difficulté de la thérapeutique psychiatrique tenait essentiellement au fait que les fonctionnements nerveux se déroulent sans lien univoque avec les séquences des comportements. Directeur de l'institut de neurologie de l'université de Francfort-sur-le-Main à partir de 1919, Goldstein poursuit avec Gelb et Riese ses travaux sur l'aphasie et tente d'élaborer une thérapeutique clinique nouvelle synthétisant l'abord médical et l'abord psychologique des troubles de la parole. Les résultats de ces recherches effectuées sur des blessés du cerveau ont été publiés en 1919 sous le titre de Traitement, aide et évaluation de soldats atteints de blessure du cerveau (Die Behandlung, Fürsorge und Begutachtung hirnverletzter Soldaten). Contraint de quitter l'Allemagne en 1933 pour raisons politiques, Goldstein accepte une chaire à l'université d'Amsterdam et publie son œuvre majeure : La Structure de l'organisme (Aufbau der Organismus, 1934 ; traduction française de E. Burkhardt et J. Kunz, 1951). Il émigre aux États-Unis en 1936, où il poursuivra pendant trente ans, dans diverses universités, une œuvre d'une remarquable fécondité.

Les conceptions théoriques de Goldstein au sujet de l'organisme sont profondément enracinées dans l'observation neurologique concrète et ne se réclament au départ d'aucune école particulière. Aussi bien est-ce à partir de la pratique médico-psychologique qu'il se voit amené à rejeter le modèle associationniste et à souligner la nécessité d'interpréter tout phénomène psychique à partir de l'ensemble des signes, normaux et pathologiques, présentés par l'organisme. Cette problématique holiste (ou holistique) rattache indirectement Goldstein à la Gestalttheorie. Cependant, l'idée de totalité organismique qu'il a constamment défendue l'a mené à aborder des questions d'épistémologie qui ont été largement négligées par la psychologie de la forme. Ainsi, l'isomorphisme de Köhler est incompatible avec une théorie qui, comme celle de Goldstein, établit une distinction radicale, et à première vue paradoxale, entre les faits des sciences de la nature et les faits biologiques. Les premiers sont des constructions abstraites quantitatives, alors que les seconds reflètent des processus adaptatifs vécus de nature qualitative ; les uns tendent vers l'instauration d'un ordre abstrait et pragmatique, tandis que les autres expriment l'autoréalisation propre à tout système vivant. En conséquence, toute théorie mécaniste (qu'il s'agisse de réflexes coordonnés, de localisations cérébrales ou d'instincts) se situe en dehors du biologique. Quant aux anciennes vues vitalistes, elles introduisaient au sein du biologique une force qui n'était, elle aussi, qu'une abstraction impossible à situer dans les processus adaptatifs de l'organisme même.

La fidélité aux actes biologiques du sujet, qui caractérise l'œuvre de Goldstein, condamne toute méthode d'analyse psychologique inspirée par la seule cohérence logique du procédé expérimental ou clinique. Seule une description des faits dégagée de tout postulat exigé exclusivement par la rigueur[...]

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Écrit par

  • : professeur honoraire à l'université de Louvain, membre de l'Académie royale des sciences et de l'Académie royale de langue et de littérature française de Belgique, membre correspondant du Muséum national d'histoire naturelle de Paris

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