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KUSAMA YAYOI (1929- )

C'est à l'âge de vingt-huit ans que l'artiste japonaise Yayoi Kusama (née à Matsumoto, préfecture de Nagano, en 1929) débarque à Seattle, dans l'État de Washington, avant de gagner New York, en 1958. Son travail en sera bouleversé, l'artiste abandonnant rapidement sa production de dessins et de gouaches de petits formats, réalisés au Japon, au profit de peintures aux dimensions plus imposantes, témoignant d'un sens de la répétition de patterns (motifs) qu'elle développera tout au long de sa carrière. La tendance, à la fin des années 1950, est propice à des agencements répétitifs ainsi qu'au monochrome, et nul ne peut contester que le fait d'avoir fréquenté l'artiste Donald Judd, qui fut son amant, ait contribué à façonner leurs langages respectifs.

L’exigence de répétition

Yayoi Kusama : «Kusamatrix» - crédits : Junko Kimura/ Getty Images News/ AFP

Yayoi Kusama : «Kusamatrix»

Usant d'un sens de la communication et de l'autopromotion savamment entretenu, Yayoi Kusama va infiltrer sans peine le milieu artistique new-yorkais et gagner la confiance de plusieurs créateurs, à commencer par son aînée Georgia O'Keeffe, peintre avec laquelle elle avait entretenu une correspondance dès 1955. La première exposition de Yayoi Kusama, en octobre 1959 à la Brata Gallery de New York, lui permet de présenter ses Infinity Net Paintings, reposant sur des absences de hiérarchie, de relation et de composition qui marqueront, à terme, l'esthétique minimaliste. L'objet tableau y est transgressé à des fins « nihilistes », l'échelle des Infinity Net Paintings coïncidant avec l'espace d'exposition : « Mes filets, dira-t-elle, croissaient au-delà de moi-même et au-delà des toiles dont je les recouvrais. Ils ont commencé à couvrir les murs, le plafond et finalement tout l'univers. »

Yayoi Kusama retraduira son exigence de répétition à l'échelle d'un environnement dans les installations qu'elle réalisera à partir d'éléments de mobilier et d'objets trouvés, recouverts d'excroissances en tissu rembourrées, présentées entre autres à la Gallery Gertrude Stein de New York, en 1964 (Aggregation : One Thousand Boats Show). La présence accentuée et obsessionnelle de protubérances phalliques dans certains de ses environnements, renforcée par une incompressible « compulsion à répéter », au sens freudien du terme, alimenteront une glose qui vise à souligner le caractère pathologique du travail de l'artiste – celle-ci ayant été, il est vrai, maintes fois internée, et sa résidence officielle étant depuis 1977 un hôpital psychiatrique à Tōkyō. Or, si une telle perspective interprétative ne peut évidemment être exclue, il ne serait pas juste d'y voir le sens d'une création liée à plusieurs facteurs de la création des années 1960, et dont la redécouverte, à la fin des années 1990, a su conférer à Yayoi Kusama un statut d'artiste aussi mythique qu'incontournable.

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire de l'art contemporain à l'université de Valenciennes, critique d'art, commissaire d'expositions

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Yayoi Kusama : «Kusamatrix» - crédits : Junko Kimura/ Getty Images News/ AFP

Yayoi Kusama : «Kusamatrix»

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